AINHOA AIZPURU

“L’année 2019 s’annonce très compliquée pour EHKOlektiboa”

Présente sur les sept provinces basques, l'association EHKOlektiboa regroupe des producteurs et des consommateurs défendant une agriculture biologique “stricte”. Mais elle connait aujourd'hui d'importantes difficultés financières qui pourraient mettre en danger son projet. Mirentxu Doyhenard, membre d'EHKOlektiboa depuis sa création, explique ses difficultés.

EHKOlektiboa a aujourd'hui besoin de 10 000 euros pour assurer le développement de son projet. ©Arantxa MANTEROLA
EHKOlektiboa a aujourd'hui besoin de 10 000 euros pour assurer le développement de son projet. ©Arantxa MANTEROLA

Depuis quand l’association EHKOlektiboa existe-t-elle ?

Mirentxu Doyhenard : L’association a été créée en 2014 mais notre réflexion a commencé en 2009. C’est-à-dire au moment du premier assouplissement du cahier des charges de l’agriculture biologique. Un autre est d'ailleurs prévu en 2022. Les agriculteurs d’EHKOlektiboa défendent une vision de l’agriculture bio plus stricte. Nous sommes clairement contre ces assouplissements qui ouvrent la porte à des entreprises n’ayant pas la même vocation, ni la même éthique que nous. A travers notre association, l'objectif des producteurs est de se protéger par rapport à la bio-industrie mais aussi de chercher à se démarquer. Nous voulons montrer aux consommateurs que nous proposons une autre agriculture bio.

Quelle vision de l’agriculture est défendue par EHKOlektiboa ?

M.D : Plus on définissait notre projet, plus nous nous sommes rendus compte qu’il se rapprochait de la définition de l’agro-écologie. C’est un terme qu'on entend de plus en plus mais particulièrement complexe, car il regroupe de nombreux paramètres. Nous sommes tous des petites fermes à taille humaine. L’aspect social est très important pour nous et nous produisons localement et dans la proximité. Avec EHKOlektiboa, nous avons fait le choix de créer un identifiant et non pas un label. Celui-ci ne définit donc pas uniquement la qualité du produit, mais prend en compte les exploitations dans leur globalité, comme la taille des fermes, mais aussi leur ancrage dans le territoire du Pays Basque.

Concrètement, quel est l'objectif de l’association ?

M.D : Le principal objectif est de créer un outil qui permette de défendre notre vision de l’agriculture bio. Nous souhaitons aussi mettre en place un véritable réseau d’agriculteurs bio à l'échelle des sept provinces du Pays Basque. Les professionnels, qui travaillent avec la même vision de l'agriculture, peuvent ainsi apprendre à se connaître et échanger leurs savoir-faire. Le but est de pouvoir pousser notre technique en agriculture biologique.

L’association EHKOlektiboa a aujourd’hui du mal à se développer. Quelles difficultés rencontrez-vous ?

M.D : Notre plus grand problème est d’ordre financier, et nous avons d’ailleurs énormément de mal à payer notre unique salariée. Malheureusement, l’association n’a à ce jour aucun soutien institutionnel qui lui permettrait de pérenniser sa situation. Au mois de décembre dernier, nous avons reçu deux refus à des appels à projets auxquels nous avions répondu. Nous espérions des subventions européennes qui ne viendront finalement pas, et l’année 2019 s’annonce très compliquée. C’est pourquoi nous lançons aujourd’hui la campagne "EHKO sostengatzen dut %100 ean" ("Je soutiens à 100% EHKO"). Le but est de trouver 100 personnes d’accord pour donner 100 euros. Grâce à ces 10 000 euros, nous souhaitons pouvoir conserver notre salariée mais aussi arriver à débloquer cette situation financière. Il y a beaucoup d’envies et d’idées dans l'association. Le projets mérite d’être dynamisé.

En dehors de l’aspect financier, l’association doit-elle faire face à d’autres difficultés ?

M.D : Répondre aux appels à projets peut être particulièrement lourd pour une association comme la nôtre. Surtout que la plupart du temps, nous devons traduire notre candidature en deux ou trois langues. Imaginez-vous, il peut s’agir de dossiers de 10, 20 voire 30 pages. C'est un travail considérable. Nous venons par exemple de répondre à un appel à projets de l’Eurorégion et nous avons dû traduire notre dossier en basque, en espagnol et en français. Tout ça pour finalement obtenir un refus. Un financement plus pérenne nous permettrait d’économiser beaucoup d’énergie.

Par ailleurs, le fait de couvrir un territoire aussi important que le Pays Basque peut s’avérer compliqué. Etant donné la complexité du projet, nous avons besoin d’organiser des réunions régulièrement et de nous rencontrer physiquement. En général, nous organisons ces rendez-vous en Gipuzkoa. Entre les temps de transport et de réunion, beaucoup de producteurs sont obligés d'y consacrer une journée entière.

L'association est constituée de producteurs et de consommateurs. Des actions spécifiques envers les consommateurs sont-elles organisées ?

M.D : Tout à fait. Des marchés spécifiques pour les agriculteurs d'EHKOlektiboa ont été organisés comme par exemple à Iruñea. En parallèle, trois ou quatre fois dans l’année, une ferme ouvre ses portes. On y organise une visite, un petit concert avec un artiste invité, et puis on déjeune tous ensemble. Ces journées-là sont à l’image de notre vision de l’agriculture. Nous sommes dans une ferme bio, nous mangeons bio et l’aspect social est mis en avant. Toutes les caractéristiques de l’agro-écologie sont en quelque sorte réunies. Cela nous permet de partager des moments privilégiés avec les consommateurs.

Plus d'informations sur EHKOlektiboa ici