MAX BRISSON

Politique linguistique : existe-t-il une volonté politique gouvernementale ?

Max Brisson. © DR
Max Brisson. © DR

La convention entre l’Education nationale et Seaska arrive à son terme. De nouvelles discussions vont s’ouvrir. Qu’elles débouchent sur des évolutions, tout le monde en conviendra. Sur des crispations et une crise, personne, je l’espère, ne le voudra. Ce serait un dramatique retour en arrière. Alors face aux nuages qui pourraient s’amonceler, parlons de Seaska, rappelons ce qu’est la Fédération et quel est le rôle des ikastola dans la politique de reconquête linguistique en faveur de la langue basque.

Seaska, pour l’Education nationale, est un opérateur qui organise un réseau d’enseignement privé sous contrat d’association avec l’Etat. Cette focale n’est pas suffisante. Pour les élus du Pays Basque, pour ses collectivités locales, Seaska est le premier opérateur d’une politique linguistique dont l’objet, maturé depuis “Pays Basque 2010”, est de sauver et de développer la pratique de l’Euskara.

Un fait s’impose. Seaska est le seul à “produire”, comme disent les socios-linguistes, des locuteurs complets capables de vivre et travailler en euskara. Même les maîtres bascophones de l’école publique ont le plus souvent fait leurs études dans les ikastola. Certes rien n’empêche demain les autres filières de jouer un rôle aussi structurant. Mais aujourd’hui, force est de constater que cette mission est assurée par Seaska. Une raison simple à cela, il ne peut y avoir de reconquête linguistique sans immersion, et au Pays Basque, il n’y a qu’un seul réseau immersif, c’est celui que pilote et anime Seaska.

Bien sûr, cela ne signifie pas pour autant que la fédération Seaska ne doive évoluer, comprendre l’environnement budgétaire dans lequel le pays se trouve et adapter son modèle pédagogique. Ce sera l’objet des discussions qui seront menées dans le cadre de la préparation de la prochaine convention entre le ministère et la fédération. Celle-ci ne sera pas le copier-coller de la précédente, tout le monde l’a compris. Le contexte a changé. Elle ne pourra pour autant s’exonérer du passé et des conditions qui ont présidé à la construction du réseau immersif des ikastola.

Au-delà, une question simple et fondamentale doit être posée au gouvernement. Sommes-nous toujours dans une logique de construction d’une politique linguistique partenariale, dont l’objectif est d’augmenter le nombre de locuteurs complets, ou simplement dans l’organisation d’un réseau d’enseignement dont on n’apprécie l’utilité que sous le seul angle des attendus de l’Education nationale ?

Mon choix est celui de la politique linguistique, comme ce fut le cas en 2005, lors de la construction de l’Office public de la langue basque (OPLB). Depuis la construction de la première ikastola, depuis le premier contrat d’association, depuis la signature de la première convention, Seaska est l’opérateur par qui s’est opérée l’inversion de la tendance qui semblait irréversible, celle du déclin irrémédiable de l’euskara. Elle l’a fait, et il faut le souligner, avec le soutien de l’Etat et, malgré un contexte législatif très contraignant, avec celui des collectivités locales.

Dans le respect du cadre et des contraintes budgétaires, un réseau performant s’est construit dans l’épreuve et parfois dans le partenariat. Ce fut lorsqu'il y a eu une volonté politique. Et elle fut toujours décisive. Je serai donc particulièrement attentif à ce qu’elle soit au rendez-vous dans les prochains mois.