Anaiz Aguirre Olhagaray

Enargia, le nouveau fournisseur d’énergie renouvelable propre au Pays Basque Nord

Quitter EDF pour un fournisseur local d’énergie renouvelable, ce sera possible dès le 7 octobre prochain au village Alternatiba de Bayonne. Au même tarif, voire moins cher qu’EDF, Enargia se donne pour objectif, à terme, de fournir une énergie 100% locale. MEDIABASK s’est entretenu avec Patxi Bergara, l’un des fondateurs d’Enargia et d’I-Ener.

A l'instar de GoiEner au Pays Basque Sud, l'objectif d'Enargia est de fournir une énergie 100% renouvelable et produite localement. © I-Ener
A l'instar de GoiEner au Pays Basque Sud, l'objectif d'Enargia est de fournir une énergie 100% renouvelable et produite localement. © I-Ener

Quatre ans après la création d’I-Ener, société de production locale d’énergie renouvelable, vous allez créer Enargia, le fournisseur local d’énergie renouvelable. Comment est née l’idée de ce projet ?

Patxi Bergara : Quand on a entamé la réflexion d’I-Ener, on s’est déjà posé la question de créer un fournisseur ou un producteur. Et finalement, comme c’était plus simple de créer l’activité de producteur, on s’était lancé dans la production.

Dans l’État français, il existe déjà la coopérative Enercoop qui fournit de l’électricité renouvelable. Dans les discussions préalables à la création d’Enargia, il a été question de créer une branche Enercoop Pays Basque. Pourquoi avoir finalement choisi de créer une société propre au Pays Basque ?

P.B. : Enercoop est dans un calendrier qui lui est propre, qui n’est pas du tout en phase avec le nôtre. Du coup, on n’aurait pas pu créer Enercoop Pays Basque avant deux ans. On aurait dû être une structure "pré"-Enercoop Pays Basque qui serait donc ensuite un apporteur d’affaires pour Enercoop. Ce qui, de base, ne nous convenait pas. On était quand même prêt à étudier la question mais sous certaines conditions, notamment le fait qu’on puisse au moins créer, ici, un poste en basque, pour répondre aux questions des personnes qui souhaiteraient les poser en basque. Donc finalement, et pour d’autres raisons aussi, ça ne s’est pas fait.

Quelle a été la démarche qui vous a motivés à créer un fournisseur local d’énergie renouvelable ?

P.B. : La démarche a été de mettre au plus proche du territoire le centre de décisions de la structure. Cela rejoint aussi la question de savoir pourquoi nous ne sommes pas allés à Enercoop. Parce qu’Enercoop est quand même très, très centralisée, même si elle tend vers la décentralisation, qui a été demandée il y a déjà deux ans, mais n’a pas encore été mise en place. A mon avis, Enercoop ne sera pas décentralisée avant cinq ou dix ans. Le parallèle peut être fait avec le Pays Basque Sud, entre Som Energia, qui est l’équivalent d’un Enercoop Pays Basque, et GoiEner qui est l’équivalent d’Enargia, et qui a beaucoup plus de clients et de sociétaires que Som Enargia.

L’énergie fournie par Enargia sera celle produite par I-Ener ?

P.B. : Actuellement la production d’énergie renouvelable en Pays Basque Nord est plutôt faible. La plupart des producteurs, en particulier hydroélectriques, sont en contrat avec EDF, notamment parce qu’EDF avait historiquement la possibilité de proposer ce qu’on appelle l’obligation d’achat, où en gros, c’est une tarification bonifiée. Ce qui fait que pratiquement tous les petits producteurs vendent leur production à EDF. D’autre part, la production d’énergie est trop faible par rapport aux besoins, et donc on avait besoin d’aller chercher l’énergie ailleurs. C’est pour cela qu’on va aux portes du Pays Basque, plutôt en Béarn. A terme, notre volonté est de développer I-Ener et de fonctionner en circuit-court, afin que 100% de la production d’I-Ener soit vendue à Enargia et qu’elle couvre les besoins de tous les clients d’Enargia.

Cela coûtera-t-il plus cher qu’à EDF ?

P.B. : Les tarifs seront similaires, et même légèrement moins chers.

Enargia est une SCIC, cela signifie que les consommateurs seront partie prenante dans les décisions de la société ?

P.B. : Oui, c’est cela.

Vous avez lancé une enquête en ligne fin août, pour voir si la population du Pays Basque Nord adhèrerait au projet d’Enargia. Les résultats de l’enquête sont-ils prometteurs ?

P.B. : Très prometteurs. Au 18 septembre, on a eu 457 réponses dont 451 favorables, et 88% des gens qui ont répondu à l’enquête, qui ne concerne que les particuliers, se sont montrés prêts à devenir sociétaires. Notre objectif est d’atteindre les 1000 réponses positives au moment d’Alternatiba, le 7 octobre prochain.

Avez-vous déjà démarché des entreprises, des collectivités ?

P.B. : De notre côté, avec I-Ener, on a sollicité les entreprises de notre réseau, qui sont également très favorables à l’idée de quitter EDF pour venir chez nous, dès que nous serons lancés.

Que faudra-t-il faire pour s’abonner à Enargia ? A partir de quand pourra-t-on souscrire, et quelle sera la marche à suivre ?

P.B. : Tout se passera à partir d’Alternatiba. Les gens pourront s’abonner à l’offre d’Enargia, mais notre priorité est qu’ils deviennent abonnés sociétaires, c’est-à-dire qu’ils souscrivent à une ou plusieurs parts du capital. Pour devenir sociétaire, il faudra remplir un bulletin de souscription et verser au minimum une part de 100 euros. De la même manière que pour I-Ener, il y aura également à terme, la possibilité de souscrire en ligne.

Quel est le territoire concerné ? Est-ce que les Landais pourront souscrire à Enargia, par exemple ?

P.B. : Normalement, Enargia ne concernera que les habitants du Pays Basque Nord. Mais après, on verra au cas par cas, en fonction des demandes. Par exemple, on a déjà reçu des demandes de gens d’ici, mais qui habitent à Paris.

Combien de postes allez-vous créer ? Où seront situés vos locaux ?

Pour les locaux, nous sommes encore dans l’attente d’une confirmation. On envisage de créer cinq postes la première année, soit d’ici fin 2019. Nous commencerons à recruter à partir du mois de janvier.

Quel est le planning des prochaines semaines ?

Dans notre planning, on prévoit la création de la société fin septembre, puis l’ouverture du capital, la demande de l’agrément ministériel et enfin, le lancement de l’offre dès fin décembre, début janvier. C'est un projet ambitieux, mais largement réalisable !