Xan Idiart

Sale temps pour la liberté de la presse

La crise sociale des Gilets jaunes a impacté les conditions de travail des journalistes dans l’Hexagone comme le rappelle le nouveau classement de Reporters sans frontières publié le 18 avril. Le même jour, une journaliste de 29 ans a perdu la vie sous les balles de la Nouvelle IRA, en Irlande du Nord.

Les journalistes doivent lourdement s'équiper pour se protéger lors des manifestations des Gilets jaunes. © David Dufresne, Tweeter
Les journalistes doivent lourdement s'équiper pour se protéger lors des manifestations des Gilets jaunes. © David Dufresne, Tweeter

"Une haine croissante contre les journalistes". Voilà comment l’organisation non gouvernementale Reporters sans frontières (RSF) qualifie la perception des médias dans l'Hexagone. La France se classe 32ème au classement mondial de la liberté de la presse, dans le nouveau rapport publié ce 18 avril. Elle gagne un rang par rapport à l’année dernière, mais de nombreuses inquiétudes sont soulevées dans ce rapport.

Le mouvement social des gilets jaunes a beaucoup impacté le travail des journalistes, rappelle l’ONG. Des manifestants, mécontents de la couverture médiatique, ont bloqué des imprimeries pour empêcher la distribution des journaux, comme cela a été le cas avec Ouest France. Des journalistes ont également été pris à partie par les gilets jaunes, comme cela a été le cas avec Pierre-Alex Barcoïsbide.

De l'autre côté, celui du pouvoir, les journalistes n’ont pas été épargnés par la violence policière, et beaucoup ont été "insultés, menacés, agressés, voire blessés par des manifestants ou par les balles de défense des forces de l’ordre". Il y aurait 62 signalements de violences policières contre les journalistes selon David Dufresne, célèbre pour recenser sur son compte twitter avec le hastag "Allô Place Beauvau" les dérives des forces de l'ordre sur les manifestants. En décembre dernier, 24 d'entre eux avaient déjà porté plainte. Le classement de RSF et son rapport concernant la liberté de la presse en France peut être consulté ici.

Gaspard Glanz, une arrestation et des questions

Pour exemple, l’arrestation samedi dernier de Gaspard Glanz, journaliste indépendant, pose question. Lors de l’acte XXIII des Gilets jaunes à Paris, Gaspard Glanz souhaite parler "au commissaire" des CRS après avoir été visé par un tir de grenade lacrymogène. Un policier le bouscule, le journaliste lui assène un doigt d’honneur et se fait arrêter. Il sera jugé pour "outrage" le 18 octobre prochain. En attendant, Gaspard Glanz a interdiction de se rendre à Paris les samedis, ainsi que le 1er mai, et est en théorie dans l’impossibilité de couvrir les manifestations parisiennes pendant six mois.

Comme le rappelle Le Monde, montrer son majeur à un policier entre dans la définition de l’outrage prévu par l’article 433-5 du code pénal. Malgré cela, la garde à vue de 48 heures dont il a fait l'objet paraît excessive à bien des journalistes, comme en témoigne ce tweet posté par Edwy Plenel, président et co-fondateur de Mediapart.

Meurtre en Irlande du Nord

De l’autre côté de la Manche, c’est un événement bien plus tragique qui s’est déroulé dans la nuit du 18 avril à Londonderry en Irlande du nord. Lyra McKee, journaliste de 29 ans, est morte sous les balles de la Nouvelle IRA, groupe nationaliste irlandais dissident qui venait d'ouvrir le feu sur des policiers. L’organisation a présenté ce mardi 23 avril ses "sincères et entières excuses" à la famille, à la partenaire et aux amis de la jeune femme, la présentant comme une victime collatérale de son action. Avant ce meurtre, le Royaume Uni était 33ème au classement de RSF.