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Enseignement immersif : ils interpellent l’État

Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre, au ministre de l’Education nationale et à la ministre de la Cohésion des territoires, les président et vice-présidents de l'Office public de la langue basque appellent à “inscrire définitivement le développement des sections immersives” dans la politique linguistique des écoles bilingues publiques et privées. Le courrier fait suite au refus de l’État des expérimentations immersives dans les écoles d’Irissarry, Aïnhoa et Anglet.

Le président de l'OPLB Beñat Arrabit est aussi vice-président à la Communauté d'agglo, en charge de la politique linguistique. © Bob EDME
Le président de l'OPLB Beñat Arrabit est aussi vice-président à la Communauté d'agglo, en charge de la politique linguistique. © Bob EDME

"Suspendre ce développement est à nos yeux inenvisageable". Voilà la conclusion que tirent le président de l’OPLB Beñat Arrabit et les deux vice-présidents Bénédicte Luberriaga et Mathieu Bergé, dans une lettre ouverte adressée ce lundi 15 avril au Premier ministre Edouard Philippe, au ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer et à Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales. Ils demandent à ce que soit "définitivement" inscrite dans la politique linguistique des écoles bilingues publiques et privées confessionnelles le développement de l’enseignement immersif en maternelle.

Il s’agit selon eux de respecter la "cohérence" de la politique linguistique mise en œuvre depuis 15 ans, dont l’efficacité a été prouvée. "L’enseignement immersif est possible bien sûr dans des écoles privées, comme les Diwan, mais pas dans les écoles publiques, car on ne peut pas raisonnablement l’imposer aux parents", déclarait début avril dans l’hémicycle la ministre Jacqueline Gourault. Pour les signataires du courrier dont elle est l’une des destinataires, ces propos "sont venus jeter un trouble" et "alimenter des réactions diverses" de la part de responsables politiques et associatifs. "J’avais des doutes mais au moins ce soir, je vais pouvoir revenir au Pays Basque et dire clairement que le Gouvernement est opposé à l’immersion", commentait alors le sénateur Max Brisson.

"La politique de développement des expérimentations immersives dans les filières bilingues à parité horaire de l’enseignement public et de l’enseignement privé confessionnel, est une politique convenue, raisonnée et fondée sur des analyses sociologiques, scientifiques et linguistiques qui plaident pour un renforcement du bain linguistique avant 7 ans", argumente l’OPLB dans sa lettre.

Des expérimentations déjà réussies

"Cette offre d’enseignement est proposée, elle n’est jamais imposée", rappellent les signataires de la lettre ouverte. Le projet d’expérimentation, expliquent-ils, ne peut s’appliquer qu’à la condition d’obtenir "l’accord unanime des enseignants et des familles, l’avis favorable du conseil d’école et l’accord de l’inspecteur d’académie". Ainsi à Aïnhoa et Irissarry, "100 % des familles concernées [sont] favorables" à un tel projet.

L’expérimentation est déjà une réalité, "validée par les acteurs de terrain" souligne l’OPLB. Cette orientation a "permis la mise en place de 17 expérimentations immersives dans l’enseignement public et 18 dans l’enseignement privé confessionnel". Et de préciser qu’"aucune des équipes enseignantes des écoles engagées dans une expérimentation n’a souhaité revenir vers un enseignement à parité horaire".

Dans son courrier, l’OPLB rappelle qu’elle a voté à l’unanimité en octobre 2018 son "Projet stratégique", consistant à "accompagner la structuration qualitative des enseignements de et en langue basque dans les filières à parité horaire : développement des expérimentations pédagogiques immersives, atteinte de la parité horaire dans le secondaire".

En toute légalité

Cette orientation politique "constitue une des mesures centrales du développement qualitatif de la langue basque. Y renoncer poserait la question de la cohérence de la politique publique développée par l’État et les collectivités territoriales au sein de l’organe commun qu’est l’Office public de la langue basque".

Le président de l’OPLB Beñat Arrabit ne pouvait pas rester "sans rien faire" face au refus du Gouvernement. Refus d’un "plan stratégique", fruit d’une année de travail avec le concours de représentants locaux de l’État. "Certains ministres ainsi que l’inspecteur d’académie souhaitent prendre le chemin inverse. Nous ne pouvons pas accepter cela. Nous avons adressé ce courrier pour leur rappeler que nous travaillons dans le respect de la légalité", martèle Arrabit, affirmant que l’enseignement immersif a porté ses fruits et qu’il n’est pas question de s’arrêter là.