AINHOA AIZPURU

Urkullu, un conciliateur dans la crise catalane

Iñigo Urkullu, président du Gouvernement basque, a été entendu en tant que témoin mercredi 28 février dans le procès qui se déroule à Madrid contre les indépendantistes catalans. Il a détaillé ses contacts avec les différents interlocuteurs à Madrid et à Barcelone, sans toutefois s’arroger officiellement le rôle de médiateur.

Le rôle d'Iñigo Urkullu dans la crise catalane a été présenté lors du procès.
Le rôle d'Iñigo Urkullu dans la crise catalane a été présenté lors du procès.

Le président du Gouvernement basque, Iñigo Urkullu, a été mercredi dernier une des vedettes du procès contre les indépendantistes catalans. Comparaissant en tant que témoin, il est revenu sur les conversations qu’il a eues avec Carles Puigdemont, président de la Generalitat de Catalogne, et Mariano Rajoy, président du gouvernement espagnol, en octobre 2017, peu avant le référendum et la déclaration unilatérale d’indépendance (DUI).

Le témoignage d'Urkullu était attendu au tribunal suprême de Madrid. Ayant de bonnes relations avec les nationalistes catalans et avec Rajoy, on sait qu’il a tenté de jouer un rôle d’apaisement au moment de la crise catalane. Restait à savoir quels avaient été les termes de ces conversations et quel avait été son rôle.

La veille, Mariano Rajoy, également entendu en tant que témoin, avait nié l’existence de toute médiation. L’ancien président du gouvernement espagnol a toutefois été vague et peu précis sur les conversations qu’il a pu avoir avant la crise. Quant à Urkullu, fidèle à son style sobre et bureaucratique, il a désarçonné le procureur et les juges en détaillant avec calme et précision tous les pas effectués pour empêcher un dénouement tragique à la crise.

Des scénarios de négociation

Le président basque n’a pas employé le terme "médiateur", mais il a exposé avec grande précision les conversations qu’il a eues avec les présidents catalan et espagnol. Démentant ainsi Rajoy, il a rappelé avoir proposé plusieurs fois, sans succès, des scénarios de négociation et détente. Son objectif était autant d’éviter la DUI que l’application de l’article 155 qui suspend l’autonomie de la Catalogne.

Urkullu a aussi expliqué que "d’après lui, le président Puigdemont n’avait pas la volonté de mettre en œuvre la DUI", mais qu’il y aurait été poussé par la pression du camp indépendantiste et le manque de volonté de négociation du gouvernement espagnol. Quant à Rajoy, Urkullu lui aurait fait part de sa peur de voir la situation dégénérer. Le président espagnol lui aurait alors assuré qu’il agirait avec mesure et "avec la plus grande délicatesse possible". D’après le lehendakari, "M. Rajoy ne semblait pas enclin à mettre en œuvre l’article 155, mais il n’a donné aucune garantie à ce sujet".

Un rôle dans la crise catalane

Le reste est histoire car, une semaine après, la police espagnole clôturait dans la violence les bureaux de vote du référendum catalan. Quelques jours plus tard, le désormais célèbre article 155 était voté au Sénat suspendant l’autonomie de la Catalogne. Bien que les termes de "médiateur" ou "médiation" n’aient pas été employés, il semble clair qu’Urkullu ait tenté de jouer un rôle dans la crise catalane d’octobre 2017. Si le président basque n’a apporté aucun élément vraiment inédit, il a montré sa volonté d’éviter que la crise éclate. En vain.

Quinze observateurs

D'autre part, quinze observateurs de neufs pays différents étaient présents pour assister au procès. Parmi eux, plusieurs eurodéputés dont José Bové (EELV) et Marie-Pierre Vieu (Parti communiste français), mais aussi les parlementaires basques Iñigo Iturrate (PNV) et Maddalen Iriarte (EH Bildu), ont pu assister au témoignage du lehendakari. Les observateurs se sont engagés à rédiger un rapport à la suite du procès.