Anita LOPEPE

“Grand débat national” sur fond de violences policières

Anita Lopepe. © DR
Anita Lopepe. © DR

Le gouvernement français organise un grand débat national afin que “nous nous reposions ensemble les grandes questions de notre avenir”. Belle intention, qui arrive cependant un peu tard.

Le sentiment d’injustice sociale accumulé ces dernières années a explosé en colère dans le cadre du mouvement des Gilets Jaunes. Le climat de défiance envers le gouvernement mais plus largement envers les institutions, les élus, voire les médias, est à son paroxysme. C’est la légitimité de l’Etat lui même qui est contestée. Le contrat social sur lequel il reposait semble rompu. Des demi-mesures n’auront donc que très peu d’effet.

C’est pourquoi le scepticisme est de mise en ce qui concerne les aboutissements de ce grand débat. Alors que Macron a exprimé maintes fois son intention de ne rien changer en profondeur, on peut légitimement douter de la prise en compte des propositions qui émaneraient de cette grande consultation.

Et puis, le climat est-il vraiment propice au débat constructif ? La France est à feu et à sang. Deux mois de mobilisation ininterrompue à laquelle le gouvernement répond par du mépris de classe dans les mots, et dans la rue, par les blindés, coups de matraques, canons à eaux, grenades GLI-F4 et tirs de Flash-Ball. On dénombre plus de 3 000 manifestants blessés, dont certains gravement ou mutilés.

“Pas de liberté sans maintien de l’ordre”, a déclaré C. Castaner, après avoir nié sans vergogne l’existence de violences policières à l’encontre des Gilets Jaunes. Le gouvernement a clairement fait le choix de la fermeté face aux mobilisations, quite à prendre le risque d’un bilan humain dramatiquement inédit dans un contexte de contestation sociale.

Manifester dans le pays des droits de l’Homme est quasiment assimilé à un acte de délinquance, et dans les faits, cela représente une prise de risque pour son intégrité physique. Ainsi, les voix s’élèvent pour demander l’interdiction des Flash-Ball et des grenades de désencerclement.

La violence policière n’est pas une pratique nouvelle. Au Pays Basque, nous en savons quelque chose (torture dans les commissariats, guerre sale, usage des Flash-Ball dans les manifestations…). En novembre dernier, le procès d’Iñigo Cabacas tué par un tir de Flash-Ball à la tête à l’issue d’un match de football de l’Athletic Bilbao, a d’ailleurs laissé un goût d’impunité. Il en fut de même à l’occasion du non-lieu prononcé dans l’enquête sur la mort de Rémi Fraisse, tué par une grenade explosive en octobre 2014 alors qu’il manifestait contre le barrage de Sivens. Banlieues, migrants, ZAD Notre-Dame-des-Landes, manif des Gilets Jaunes, le recours à la force par la police va crescendo en France.

La dérive autoritariste du pouvoir est très préoccupante et devrait alarmer toute personne soucieuse du respect des libertés les plus élémentaires, telle celle de manifester. La loi anti-casseurs sera débattue très prochainement : quelle sera la position des parlementaires basques sur la question ? A suivre… En attendant, toutes ces mesures répressives présagent un climat tendu et liberticide pour le sommet du G7, au Pays Basque, en août prochain.