Willy ROUX

Edouard Detchart : “Ce trinquet, c’est la vie”

Double champion de France chez les amateurs avec Rémi Irigoyen puis champion de France par équipes chez les indépendants en 1974, Edouard Detchart, 76 ans, connaît sur le bout des doigts le trinquet Berria. Natif du quartier Celhay d’Hasparren, le premier éducateur de Peio Larralde et toujours entraîneur à la Noizbait, raconte ses souvenirs dans le “temple de la pelote”. A l'occasion de l'inauguration du trinquet Berria, il a répondu à nos deux questions.

Edouard Detchart devant le trinquet Berria d'Hasparren. © Bob EDME
Edouard Detchart devant le trinquet Berria d'Hasparren. © Bob EDME

Quel est votre avis sur la rénovation du trinquet Berria ?

C’est un rêve. Quand j’ai entendu que c’était Jean-Marc Charritton, Hazpandar, qui était candidat, je me suis demandé : comment ça se fait ? Ce n’est pas possible avec toutes les affaires qu’il a déjà. La preuve que si, c’est possible. Hier, quand je suis rentré au trinquet avec Peio Larralde, une fois les travaux finis, eh bien… c’est un temple ! Quand on regarde le mur de face on dirait que l’on se trouve dans une église avec les galeries à gauche et la paroi de verre, avec 400 places sur le côté droit, c’est extraordinaire. Ce trinquet est conçu de manière extraordinaire avec la première galerie où vous n’avez pas de poteaux et la charpente juste maintenue par des ferrures. C’est grandiose. C’est beaucoup d’émotion, car cela fait des années que le public ne peut pas voir de parties de pelote à Hasparren.

J’ai les billets pour les trois jours du Master d’Hasparren. Ce trinquet manquait vraiment. Des joueurs d’Hasparren comme Peio Larralde ou Alexis Inchauspé n’ont jamais joué chez eux ! Puis, après les Masters, il y aura tous les vendredis. Une sorte de tradition comme à Garazi le lundi. J’espère que ça va marcher. Pour nous, anciens joueurs de pelotes et pilotazale, nous allons en profiter. Il suffit de voir aussi les alentours du trinquet. L’hôtel magnifique, le restaurant et le chapiteau vont donner vie à la ville d’Hasparren.

Quels souvenirs gardez-vous de ce trinquet ?

Je n’ai que des bons souvenirs dans ce trinquet. Avec mon ami, Rémi Irigoyen, nous y avons remporté deux finales en amateur. Dans les années 50, il y avait beaucoup de monde au Berria car il n’y avait que la pelote, il n’y avait pas le rugby, rien. Dans ce temps là, le dimanche, il y avait les vêpres avec beaucoup de monde. Et après les vêpres, c’était quoi la distraction ? Venir au trinquet Berria où on regardait les parties de main nue. Et après, c’était les parties de mus. C’était des parties de défis et des grands joueurs comme Arcé, Darraidou, ou encore Aguerre, Haran, Etchemendy que j’ai mieux connus. Il y avait aussi les incontournables parieurs. Il y avait l’argent liquide en poche. A Hasparren, il y avait presque 1 500 ouvriers dans les chaussures. Même après l’usine, il y avait des parties le soir.

Je me souviens aussi d’un tête à tête entre Harambillet et Aguerre. J’avais huit ans. J’étais venu avec mon père. Le trinquet était si plein qu’on ne pouvait pas rentrer. J’étais au filet de gauche. En haut, je ne pouvais pas voir. Alors je me faufilais au filet de gauche. De là, je voyais la partie. A 48-49 pour Aguerre, Harambillet est sorti pour changer de chemise, il était en sueur. Il y est resté un moment. Le public grondait “il ne va pas venir”, et Aguerre tournait sur la kantxa. Il était fou furieux. Harambillet a pris cinq minutes pour se chauffer les mains, il bute deux fois et remporte la partie. Ça a vibré énormément, c’était la vie.