Justine Giraudel

Tutak lance le Jeudi Gras et le festival Hartzaro

Le festival Hartzaro débute ce soir, mercredi 11 février. Demain, en ouverture des spectacles de rue, la programmation de 'Tutak' : renouant avec les charivaris d'antan, cette tobera mustra mêle percussions, danse, comédie et bertsu. Portée par des artistes amateurs et professionnels, au service du duo tradition et création.

Si le procès du Mardi Gras est en bilingue, les scénettes de Tutak seront en basque. © Sylvain SENCRISTO
Si le procès du Mardi Gras est en bilingue, les scénettes de Tutak seront en basque. © Sylvain SENCRISTO

A la fin de l'hiver 2012, le carnaval d'Ustaritz renouait avec la tradition du Jeudi Gras et les tobera mustra – parades charivariques : 'Tutak', création pluridisciplinaire impulsée par le Festival Hartzaro, lance désormais cette semaine de festivités. S'appuyant sur la tradition culturelle basque elle s'allie à la modernité, à la jeunesse uztariztar et à la richesse des artistes amateurs et professionnels de son territoire.

Dix-huit percussionnistes (issus des groupes Burrunka et Afrika Dambo), quinze Zirtzil, dix danseurs, cinq comédiens et deux bertsulari se retrouvent actuellement pour répéter cette création, qui sera offerte au public ce jeudi 12 février à 19h30 au fronton Hiribehere d'Ustaritz. Les artistes amateurs peuvent compter sur l'accompagnement d'artistes professionnels (musiciens, metteur en scène, danseurs). Une des caractéristiques des projets montés par l'association Herri Soinu, organisatrice du Festival.

Sa deuxième spécialité : l'alliance de la tradition et de la création, colonne vertébrale de 'Tutak'. ''La pâte Uztariztar'' décrite par Jokin Irungaray, artiste polyvalent se consacrant ici à la mise en scène. Il a composé quatre morceaux de percussions avec Jérôme Martineau (Pierre Sangla en direction musicale), accompagnant quatre danses elles aussi créées pour l'occasion (par Laurent Hariñordoquy). Entre chaque morceau une tobera, trois scénettes montées par Haritz Videgain et les comédiens qui reviennent sur ''les potins'' du village.

Une jeunesse rompue à ce type d'exercice, qui a su trouver une place active dans l'action et l'animation culturelle du territoire, avec l'approbation de ses aînés. ''La force et la considération portée à la jeunesse basque est très forte, très étonnante'' explique le metteur en scène. Ce que confirme Haritz Videgain : ''On a une totale liberté de ton, on peut tout dire, parfois même jusqu'à la provoc'.''

Une tradition qui n'est pas propre à Ustaritz mais que le milieu associatif local sait défendre. Au même titre que les mascarades, les charivaris relèvent d'une tradition à l'origine portée par les jeunes hommes célibataires. Plus ou moins éteinte dans les années 50, sa dynamique reprend depuis quelques années : des villages entiers se sont dernièrement mobilisés sur ce type de manifestation (Itxassou, Irissary, Urrugne).

"Plus sociologique, politique"

Les charivaris ne sont ni plus ni moins qu'une dénonciation d'actes réprouvés par la morale villageoise et des personnes qui les ont commis. Si traditionnellement il était plutôt question de mettre sur la place publique la transgression des mœurs, le propos actuel aura évolué. ''Aujourd'hui, il existe une nouvelle lecture plus militante, plus sociologique, politique'' – explique le musicien. Elle serait arrivée dans les années 70 à Iholdy, suite à l'expulsion programmée d'un meunier par la Mairie qui avait le projet de transformer son terrain en lac, à des fins touristiques. Le village était alors venu en soutien à l'inquiéter.

Qui aura eu l'occasion de fréquenter le milieu des carnavals fera le lien avec le procès de Zanpantzar, qui clôt traditionnellement la période du carnaval le Mardi Gras, à Ustaritz. Haritz Videgain explique que ces deux temps sont complémentaires : ''Au moment du procès du Mardi Gras, nous avons peu de temps pour traiter de beaucoup de sujets. 'Tutak' nous permet d'en aborder d'autres''. Et de s'attaquer à d'autres personnes. A qui ? ''On essaie de mettre une pêche à tout le monde'' prévient Jokin. Haritz renchérit : ''On ne va pas tout dévoiler. Ce qui est sûr, c'est qu'on a eu un changement de maire [Bruno Carrère a pris la relève de Dominique Lesbats, ndlr]. On prenait un grand plaisir à chercher l'ancien, le nouveau doit s'attendre à ce qu'on se moque de lui.''