Goizeder Taberna

Comme une douche froide

Le Pays Basque a été épargné par la canicule du mois de juillet. Mais les agriculteurs ne font pas les fanfarons, ils sont conscients que les années à venir seront cruciales

Goizeder Taberna est journaliste et éditorialiste à Mediabask. © Sylvain Sencristo
Goizeder Taberna est journaliste et éditorialiste à Mediabask. © Sylvain Sencristo

Un torrent d’eau issu de la fonte des glaces se déverse en abondance sous un pont de la ville de Kangerlussuaq, située à l’ouest du Groenland. Accompagnées de leurs commentaires, les images sont violentes, anxiogènes même. Rien que pour la seule journée du 1er août, le Groenland a perdu onze milliards de tonnes de banquise. Pour le mois de juillet, les scientifiques ont compté 160 milliards tonnes. La faute à la canicule installée dans le continent européen. La vague de chaleur a fini par toucher la deuxième plus grande île du monde, lit de la calotte glacière. Conséquence, le niveau des mers a augmenté de plus d’un demi millimètre (0,65), un chiffre normalement prévu pour 2050. Pendant un laps de temps, ces chiffres nous sonnent.

Et cela se poursuit. L’eau pour la consommation, elle, frôle les niveaux les plus bas dans certains pays. Un quart de la population mondiale est sur le point de ne plus avoir accès à l’eau d’après World Resources Institute. Ce dernier considère que ce “stress hydrique” touchant 17 pays de la planète, proche du “jour zéro” lors duquel plus aucune eau ne sortira du robinet, atteint un niveau très inquiétant. “La pénurie en eau est la plus grande crise dont personne ne parle. Ses conséquences prennent la forme d’insécurité alimentaire, de conflit, de migration, et d’instabilité financière”, a déclaré le PDG du World Resources Institute. Cette crise augure une crise sociale et humanitaire sans précédent et notre Bidasoa en connaît déjà les conséquences avec l’arrivée au compte-goutte de migrants. Sans eau suffisante pour répondre aux différentes activités humaines et aux besoins de l’environnement dans ces pays, le bouleversement sera mondial. D’après l’Onu, le déficit hydrique global serait de 40 % dès 2030.

Le Pays Basque a été épargné par la canicule du mois de juillet. Mais les agriculteurs ne font pas les fanfarons, ils sont conscients que les années à venir seront cruciales. Il a suffi que la canicule sévisse pendant quelques heures pour que les fruits et légumes cessent de mûrir, que la récolte soit retardée. C’est dans ces moments-là, alors que la légèreté et l’insouciance estivales nous gagnent, que refont surface les paroles de ceux qui ont les mains dans la terre tout au long de l’année pour que notre territoire soit plus résiliant, l’agriculture durable et la souveraineté alimentaire réalité. Et on se dit que tout cela avance lentement, trop lentement.

Face aux images diffusées en boucle de catastrophes naturelles, de sécheresse, de famine, de migrants en détresse au milieu de nulle mer, nous pourrions opter pour la fuite. Nous pourrions nous retirer dans une maison, loin de tout, entourés de champs, de points d’eau et équipés d’une calèche, en prévision de la rupture de stock du pétrole, comme l’ancien ministre français de l’Environnement Yves Cochet. Un sauve qui peut, finalement, pas très rassurant si le reste de la planète continue de brûler et nos sœurs et frères avec.

Alors que les responsables de ce modèle de société générateur de crises sociales se retrouvent à Biarritz, sous nos fenêtres, cette violence que l’on subit doit se transformer en initiatives collectives. Raisonner, ne pas succomber aux discours démagogiques, réfléchir et agir, tel est le défi qui nous attend. En espérant que le contre-sommet du G7 soit l’occasion de tracer des voies et d’arriver à dessiner un cercle vertueux qui renversera le cours des choses.