Xan Idiart

Coups de bec entre la CCI et la Semaine du Pays Basque

Deux affaires liées entre elles opposent l'hebdomadaire et la Chambre de commerce et d'industrie de Bayonne. Chacun attaque l'autre pour diffamation. La justice rendra ses jugements le 2 juillet.

André Garreta à gauche et Jean-Philippe Ségot à droite seront fixés sur leur sort le 2 juillet.
André Garreta à gauche et Jean-Philippe Ségot à droite seront fixés sur leur sort le 2 juillet.

Dire qu'un conflit oppose la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Bayonne à la Semaine du Pays Basque est un euphémisme. Les deux entités se sont retrouvées au tribunal de Bayonne ce 5 juin, chacune étant tantôt partie civile, tantôt prévenue. Ces affaires intrinsèquement liées trouvent leur source en janvier 2018.

"A cette époque, l'attachée de presse de la CCI m'appelle et me dit vouloir arrêter les contrats publicitaires car nous ferions trop de place au Medef", explique Jean-Philippe Ségot, directeur du journal. Rien d'illégal. La rupture est consommée, même si le journaliste ne comprend pas cette décision.

Mais un mois plus tard, l’hebdomadaire publie un dossier intitulé "le grand mensonge" à propos des paroles tenues par André Garreta sur la nouvelle taxe transport. Elle n'impactera pas les entreprises, promet le président de la CCI. La Semaine interroge également l'ancien préfet et le président de la communauté d'agglomération Jean-René Etchegaray. Problème : les deux hommes ne seraient pas totalement sur la même longueur d'ondes qu'André Garreta. Ils auraient même discuté ensemble des éventuels côtés négatifs de la mesure. "Soit le président de la CCI ment, soit c'est une nouille", se disent alors les membres de la rédaction.

Parole contre parole

Arrive ensuite sur le devant de la scène Nilda Jurado, vice-présidente de la CCI. Elle publie, selon l'hebdomadaire, un message Facebook, dans lequel elle affirme que la Semaine du Pays Basque est en faillite, et racheté par Philippe Neys président du Medef. Jean-Philippe Ségot fait faire un constat d'huissier de 40 pages pour prouver le contraire, et attaque l'élue de la CCI en justice pour diffamation. "Ses propos sont faux. D'ailleurs, la Semaine a réalisé un bénéfice positif en 2017 et même en 2018, et le journal n'est pas repris par Philippe Neys".

Autre problème, Nilda Jurado n'aurait jamais écrit le message comme tel. Et de citer son post : "Philippe Neys, auto-proclamé président du Medef, envoie à des fins personnelles aux chefs d'entreprises l'édito du torchon de la Semaine du Pays Basque qui a été créé en concertation Medef/Semaine du Pays Basque, ce journal qui avait changé de bord pour un financement qui sauverait la Semaine d'un redressement judiciaire. Merci le Medef". La vice-présidente de la CCI fait référence au rachat de l'hebdomadaire par Jean-Philippe Ségot en 2016. "Je n'ai jamais parlé de faillite à venir".

L'élue assure en revanche en avoir eu assez de voir le président du Medef relayer les articles "qui vomissaient" sur André Garreta, tout en ayant sa publicité dans le journal. De là, à parler de création du journal avec le Medef, l’argument paraît un peu court à ses détracteurs. Pour précision, Jean-Philippe Neys a présenté une liste en 2016 pour présider la CCI, mais a perdu largement son pari. Une rivalité existe donc bel et bien avec André Garreta, encarté à la CGPME.

Un contentieux personnel

Ce dernier décide alors lui aussi de porter plainte pour diffamation contre Jean-Philippe Ségot et Axel Bucker, directeur de publication. L'élu n'a pas digéré le dossier sur la taxe transport. 'Se faire traiter de menteur et d'incompétent, ça fait beaucoup", condamne-t-il. Au micro de France Bleu Pays Basque, son avocat évoque la fin des contrats publicitaires en janvier 2018 pour parler d'un contentieux personnel que le journal aurait voulu régler par le biais d'une publication. "Leur article n'était pas étayé de preuves", poursuit André Garreta. Ce dont se défend Jean-Philippe Ségot, "nous avions plusieurs interlocuteurs. Tous ne disaient pas la même chose, et nous aurions sorti l’article quoi qu’il arrive". Pour lui, la liberté de la presse est en jeu dans cette histoire.

Diffamation contre diffamation. Parole contre parole. Le tribunal donnera son jugement le 2 juillet, pour les deux dossiers. A moins de faire appel, il s’agira du dernier mot dans cette affaire.