Béatrice MOLLE-HARAN

Les accusés nient en bloc les agressions

Les huit jeunes d’Altsasu accusés d’avoir agressé deux gardes civils et leurs compagnes la nuit du 15 octobre 2016 comparaissent depuis lundi pour “terrorisme” devant l’Audiencia nacional de Madrid. Ils nient en bloc les accusations portées contre eux.

En solidarité, 50 000 personnes ont défilé à Iruñea samedi dernier. © Foku / Iñigo URIZ
En solidarité, 50 000 personnes ont défilé à Iruñea samedi dernier. © Foku / Iñigo URIZ

Trois d’entre eux sont en prison préventive depuis plus de 500 jours et le procureur a demandé entre 12 et 62 ans de prison pour les huit jeunes gens. Un total de 375 années de prison. Rappel des faits : ce 15 octobre 2016, vers 5 heures du matin, dans un pub d’Altsasu, les insultes fusent, une bagarre éclate entre deux gardes civils et d’autres personnes. L’un des accusés Jokin Unanumo reconnaît avoir reproché à un garde civil qui prenait un verre de l’avoir verbalisé quelques jours auparavant, mais en aucun cas de l’avoir agressé. La bagarre continue dans la rue devant le pub, et c’est sur le seul témoignage des gardes civils que ces huit jeunes furent embarqués. Une bagarre de fin de nuit sous fond d’alcool, en cette période de fêtes du village. Une affaire qui devait logiquement être jugée à Iruñea, mais la justice espagnole l’a qualifiée de délit de terrorisme. Malgré les protestations multiples venant de toutes parts, l’affaire est donc jugée durant deux semaines à Madrid devant l’Audiencia nacional. Certains accusés nient même leur présence ce soir-là, et tous démentent leur participation au mouvement Ospa, luttant contre la répression et la présence des forces de police. Accusation d’appartenance à Ospa également portée par les parties civiles qui entendent politiser ce procès afin de justifier les accusations de terrorisme. Par ailleurs, Concepcion Espejel, présidente de la salle du tribunal de l’Audiencia Nacional, est mariée avec un garde civil. Un lien personnel laissant soupçonner un conflit d’intérêt. Ce que n’a pas manqué de soulever la défense. Demande aussitôt rejetée par le tribunal.

Réprobation unanime

50 000 personnes ont manifesté dans les rues d’Iruñea samedi afin de protester contre ce procès qu’ils jugent inique. Geroa Bai, EH Bildu, Podemos ont témoigné par la voix de leurs responsables à ce procès, dénonçant le fait qu’il était anormal que trois jeunes gens pourrissent en prison depuis plus de 500 jours pour une simple accusation de bagarre. “Ce n’est pas un hasard si cela se passe en Pays Basque et en Navarre. On ne peut pas continuer à appliquer une politique judiciaire de vengeance”, a dénoncé Bakartxo Ruiz, parlementaire d’EH Bildu. Même le lehendakari Iñigo Urkullu a déclaré que les faits reprochés à ces jeunes ne correspondaient pas à la qualification de délit de terrorisme et qu’il espérait une justice basée sur la rationalité et la juste proportion. Le gouvernement de Navarre et la mairie d’Iruñea ont également protesté contre cette procédure. Fait notoire tant cette procédure est inédite, un représentant d’Amnesty International assiste au procès en tant qu’observateur. Une des avocates de la défense, Amaia Izko, a par ailleurs dénoncé que les témoignages, photos, documents ou autres prouvant notamment l’absence de certains de ces jeunes lors de cette nuit d’échauffourées n’aient pu être présentés, car rejetés par le tribunal.