Saint-André, Bénédicte

Gave-Ledoux, les valeurs actuelles du rugby ?

Le bateau continue de tanguer dangereusement au Biarritz Olympique. L'un des nouveaux hommes forts du club, Charles Gave, est adepte de la théorie d'extrême-droite du "grand remplacement".

Charles Gave est très souvent invité par TV Libertés, fondé par des anciens du FN © capture écran
Charles Gave est très souvent invité par TV Libertés, fondé par des anciens du FN © capture écran

L'argent n'a-t-il à ce point pas d'odeur qu'un idéologue de la droite identitaire puisse prendre le contrôle d'un club de rugby en difficulté financière ? C'est la question que pose actuellement la présence de Charles Gave au conseil d'administration du BOPB et dont les déclarations passées et récentes laissent les Biarrots groggy.

Charles Gave n'est pourtant pas un inconnu au BO. En mai 2017, le fondateur de sociétés financières basées à Hongkong est appelé à la rescousse par Bruno Ledoux, récemment entré au capital. Il est déjà actionnaire de l'UBB et injecte 1,3 millions d'euros dans le BO, le sauvant in extremis de la faillite. Mais à l'époque, personne n'y trouve rien à redire.

Ce n'est que lors du dernier conseil d'administration, quand les historiques se font écarter au profit de l'homme d'affaires que l'un des leurs confie avoir réalisé que " le loup était entré dans la bergerie". Les propos de Charles Gave plus que méprisants à l'égard de Kampf et de l'ancienne direction dans les colonnes de Sud-Ouest ainsi que de rapides recherches Google ne feront que confirmer cette intuition.

OPA sur les valeurs du rugby

En septembre dernier, Gave publie un article dans la revue ultra-conservatrice Causeur. L'homme y prétend que la "population musulmane" sera majoritaire en Europe en 2050. Il reprend ainsi la rhétorique du "grand remplacement", théorisé par Renaud Camus, selon laquelle les Français "de souche" seront évincés démographiquement par des peuples non européens, principalement issus des pays du Maghreb et de l'Afrique subsaharienne.

Dans la foulée, Libération, dont l'actionnaire majoritaire n'est autre que Bruno Ledoux, l'autre homme fort du BOPB, se fend d'un article dans sa rubrique Intox visant à contrecarrer les "calculs foireux de Causeur", calculs par ailleurs totalement récusés par les spécialistes, sur le fond comme sur la forme. "Parler de personne d’origine musulmane n’a aucun sens, pas plus que de suggérer que la religion musulmane s’hérite", souligne alors Libé.

Bien que Charles Gave se présente comme un économiste libéral et se soit toujours défendu d'être d'extrême droite, la porosité entre ses thèses, sortie de l'euro compris, et l'extrême-droite est factuelle. L'article de Causeur a d'ailleurs été immédiatement repris par les identitaires Fabrice Robert et Damien Rieu, proche de Marion Maréchal-Le Pen. Et ses billets, qu'il publie dans Valeurs Actuelles, ou sur la plateforme Institut des libertés qu'il a fondée, font régulièrement le bonheur de la fachosphère.

Comment alors, tout ce petit monde a-t-il pu se réunir sous la bannière d'Atsi, société fondée par Bruno Ledoux et qui a actuellement le contrôle du club de Biarritz ? Personne aujourd'hui au sein du BO ne parvient à se l'expliquer. "Bruno Ledoux ne s'est pas exposé. Gufflet (le nouveau président du club, ndlr) est un fusible commode en cas de crise", commente néanmoins un proche du dossier.

Un plan B ?

Un président fraîchement élu qui, d'après nos informations, n'apprécie guère la tournure qu'ont pris les événements. Gufflet continue de prétendre qu'il voulait sincèrement une co-présidence avec Brusque, pour maintenir continuité et unité au sein du club.

Depuis les saillies de Gave dans la presse, il n'a plus pris de position publique. Ni pour confirmer ni pour infirmer les propos polémiques du milliardaire. Ce week-end, il a toutefois envoyé un message aux joueurs et au staff, regrettant le climat actuel, disant prendre du recul et travailler d'arrache-pied à la reconstruction du club .

Par ailleurs, il a choisi de temporiser concernant les exigences de Gave, confier la régie publicitaire à Jean-Baptiste Aldigé, son bras droit, décrit comme "arriviste aux dents longues" au sein du club, et lancer un audit. "Ces dossiers sont pour l'instant en attente", confie une source interne. Enfin, Gufflet a fait savoir par le biais de son entourage qu'il était en mesure de proposer un plan B pour évincer la mouvance Gave. Info ou intox ?