Iurre Bidegain et Argitxu Dufau
Entrevista
Fermin Muguruza et Harkaitz Cano
Artiste et écrivain

Black is Beltza : "la BD est le cinéma parfait"

Fermin Muguruza et Harkaitz Cano ont présenté le projet Black is Beltza à MEDIABASK.EUS. Le point de départ du projet est un fait historique trouvé par hasard dans un journal par F. Muguruza. En 1963, les géants de Pampelune de couleur noire n'avaient pas pu défiler dans les rues de New-York à cause du racisme de l'époque. Jeudi 19 mars, lors du festival Bi Harriz Lau Xori à Biarritz, la bande dessinée animée sera projetée.

Fermin Muguruza et Harkaitz Cano lors d'une séance de dédicace à Bayonne - © Bob Edme
Fermin Muguruza et Harkaitz Cano lors d'une séance de dédicace à Bayonne - © Bob Edme

Quel a été le point de départ de ce projet ?

Fermin Muguruza : tout a commencé à partir d’une photo. Il y a 15 ans, le journal Egunkaria avait publié une photo dans laquelle apparaissait les géants de Pampelune défilant sur la 5e avenue de New-York. Une photo pleine de force, avec une légende qui en avait encore plus. En effet, on pouvait y lire qu’en octobre 1963, les géants de Pampelune avaient été invités pour défiler à la foire mondiale de New-York mais à cause du racisme de l’époque, les géants noirs n’avaient pas pu y participer.

J’avais donc découpé cet article en pensant qu’un jour j’en ferai quelque chose. Les années sont passées, je me suis intéressé à d’autres sujets comme les services secrets cubains qui aidaient les révolutions d’Amérique Latine ou les mouvements révolutionnaires nord américains comme les Black Panters, l’accueil des réfugiés… Avec toutes ces histoires j’ai commencé à écrire un petit synopsis.

C’est à ce moment que vous avez contacté Harkaitz Cano ?

F. M. : J’ai appelé Harkaitz en lui disant que je voulais écrire le synopsis d’un film d’animation et s'il était prêt à écrire un script à quatre mains avec moi.

Finalement une bande dessinée, pourquoi ?

Harkaitz Cano : dans un premier temps,  nous voulions réaliser un long métrage animé pour adulte, un projet très ambitieux, il y a beaucoup de personnages et le budget aurait été trop élevé. En étant plus réaliste, nous nous sommes demandé pourquoi nous ne ferions pas un roman illustré. Il est vrai que j’ai beaucoup travaillé dans la bande dessinée et je dis toujours qu’elle est le cinéma parfait. La BD a beaucoup d’avantages du cinéma avec peu de désavantages de celui-ci. C’est pour cela que nous avons fait ce choix.

Pourquoi donner vie à cette BD ?

F. M. : cette idée a émergé lors d’un repas et nous avions même évoqué de le faire en deux parties, nous avions préparé un script de plus de 140 pages. Nous cherchions un illustrateur et nous pensions publier la première partie et plus tard la deuxième. Lorsque le script a été terminé, je me suis rendu à Los Angeles et j’avais pu voir les illustrations de Jorge Alderete. Lorsque je les ai vues, j’ai pensé qu’elles étaient adaptées à notre travail. Je les ai envoyées à Harkaitz, elles lui ont plu aussi. Lors de notre prise de contact, c'est lui même qui a décidé de réaliser l'oeuvre en entier et de la présenter. Trois années de travail ont suivi.

Quel sont les principaux thèmes abordés dans l’oeuvre ?

F. M. : ici nous avons un événement historique qui nous donne beaucoup de clefs. Comment dans les années 60 le racisme est un moyen d'appliquer la censure à un événement culturel. 
Il est vrai que les géants de Pampelune font partie de notre culture. Après, il faut remettre cette histoire dans son contexte. Tout ces composants sont bien vivants, au même titre la musique, tout les éléments culturels, et nous basques tout en maintenant cela nous nous ouvrons au reste du monde. En prenant ça comme point de départ, nous avons imaginé comment on peut parler de racisme, mais aussi d'amour et d'envie de vivre.

Le mot racisme est encore très utilisé aujourd’hui, vous pensez que la situation a beaucoup évolué des années 60 à nos jours ?

H. C. : moi je dirais que malheureusement la situation n’a pas beaucoup changé. Quand on voit certains événements, on dirait qu’on fait un bond en arrière de 40 ans. Cela se produit avec le racisme mais avec beaucoup d’autres choses. Au final, on peut dire que le livre aborde plusieurs aspects. Le racisme en est un, mais la relation avec la musique afro-américaine peut en être un autre. Il est possible d’y trouver plusieurs lectures et pourquoi pas des relectures.

Cela a été difficile de travailler à plusieurs sur ce projet ?

H. C. : je pense que non, il est vrai que nous sommes habitués à travailler sans arrêt avec plusieurs corps de métiers. J’ ai travaillé avec beaucoup de monde, mais j’ai connu peu de personnes aussi travailleuse que Fermin. C’est une chance. Sentir que la personne qui est devant toi a beaucoup de possibilités et est capable de diriger le navire.

F. M. : c’est moi qui ai écrit le texte des chansons. Pour la BD par exemple, la première chanson de Kortatu s’inspire d’une BD. La asamblea se ha reunido… Comme Harkaitz le dit, nous travaillons dans différents domaines. Pour Black is Beltza j’ai pensé à Harkaitz, si j’arrivais à le convaincre.

Cela n’a pas été facile ?

H. C. : c’est impossible de dire non à Fermin. Lorsqu'il m'avait montré l'extrait du journal, j'avais pensé tout de suite qu'il y avait une histoire. Là, il y a tout. Ce qu’il manque c’est de déployer l’accordéon.

Pour certaines personnes, il suffit de cinq lignes pour imaginer un tel synonpsis. Il y a tout là, il ne manque plus qu'à le publier.


D’autres projets prochainement ?

F. M. : le livre a un long parcours, il sera prochainement publié en Colombie. En Argentine aussi. Il y aura plusieurs présentations à Madrid. Il reste encore beaucoup de travail. Il reste encore une chose en suspend : faire un film d’animations. L'aventure n'est pas encore finie. Il y a le livre, l’histoire aussi et la chanson. J’ai rencontré des producteurs d’animations, nous continuons à fond.