AINHOA AIZPURU

L'envers du décor de l'Ancien Bayonne

Le service en charge de l'hygiène et la sécurité de la Ville de Bayonne a signalé quatre bâtiments en "péril imminent". Si les quartiers anciens de Bayonne sont connus pour leur patrimoine historique important, les besoins d'entretien de ces bâtiments posent parfois des problèmes.

La ville de Bayonne a 2 000 ans d'histoire.
La ville de Bayonne a 2 000 ans d'histoire.

S’il y a bien un service où on ne s’ennuie pas à la mairie de Bayonne, c’est celui en charge de l’hygiène et la sécurité. Parce que oui, Bayonne peut bien se vanter de son label "Ville et Pays d’Art et d’Histoire", de son patrimoine architectural rare, et de son centre historique avec son lacis de ruelles. Mais derrière cette belle vitrine se cache aussi le revers de la médaille. La préservation de ses quartiers anciens s’accompagne de son lot de complications pour les propriétaires et pour la municipalité. Actuellement, quatre immeubles du centre ancien sont frappés de "péril imminent" par la mairie.

Légalement, la municipalité est compétente en matière de péril lorsque l’état d’un immeuble, même privé, met en danger la vie de ses habitants. A Bayonne, le maire Jean-René Etchegaray s’est vu contraint de prendre des arrêtés de péril imminent pour quatre immeubles situés respectivement au 5 impasse Barroilhet dans le quartier Saint-Esprit, au 40 rue d’Espagne, à l’angle de la rue des Tonneliers et du quai Galuperie, et au 35-37 rue des Basques. Ce sujet n’est pas à prendre à la légère comme le souligne Jean-Paul Salducci, conseiller municipal en charge de ces questions : "Lorsque l’on parle de péril imminent, c’est d’un potentiel effondrement de l’immeuble dont il est question". Les images de l’effondrement de trois immeubles dans la rue d’Aubagne à Marseille sont encore fraîches dans les mémoires.

Des chantiers figés

Ainsi, la Ville a procédé à l’évacuation des bâtiments et à la sécurisation de leur périmètre. Les propriétaires ont alors été priés de réaliser dans le plus bref délais les travaux adéquats. Et pourtant, malgré quelques travaux de confortement temporaires, les chantiers semblent bien s’être figés. Daniel Curutchet, responsable hygiène et sécurité à la mairie, en donne les raisons : "Les propriétaires ont réalisé des recours auprès du tribunal de grande instance à la recherche d’autres responsables". Les importantes dépenses qu’engendreront les travaux y sont vraisemblablement pour quelque chose. En attendant les conclusions d'un nouvel expert, la procédure est arrêtée. "On ne peut plus rien faire tant que la procédure judiciaire n’est pas arrivée à son terme" souligne D. Curutchet.

Face au constat d’un parc de construction particulièrement dégradé dans les quartiers anciens de Bayonne, la Ville mène une politique volontariste et a mis en place un programme spécifique d’aides aux propriétaires qui souhaitent réaliser des travaux de rénovation. Mais pour J.P Salducci, "nous ne sommes pas à l’abri d’un pépin un jour ou l’autre. Il existe des bâtiments dégradés dont nous n’avons pas connaissance. De plus, il n’est pas rare que des travaux aient été réalisés en utilisant des "cache-misères" qui empêchent de voir l’état désastreux des charpentes attaquées par des insectes xylophages". Un problème récurrent à Bayonne à l’image de l’édifice située impasse Barroilhet et frappé de péril imminent. Les propriétaires ont alerté le service compétant de la mairie suite à la détection de fissures sur le bâtiment. Les sondages réalisés sur les colombages ont démontré que la structure en bois ne permettait plus le maintien de l’immeuble.

Faire du "social"

Par ailleurs, sur les 125 dossiers pour logements insalubres ou impropres à l’habitation déposés auprès du Département, plus de 90% correspondent à des quartiers du Bayonne ancien. Les immeubles, dont certains datent du Moyen-Âge, sont particulièrement dégradés. Or, la pression immobilière très forte incite des personnes en situation sociale très défavorisées à accepter des logements considérés comme insalubres. Daniel Curutchet regrette l’attitude de certains propriétaires à vouloir faire du "social" en oubliant la dignité : "Quitte à faire du social, on fait du social correctement sans mettre à disposition des logements insalubres et dégradés".