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L’isolement, la mesure d’exception renforcée au premier degré

L’isolement est la mesure la plus extrême que subissent les prisonniers de premier degré incarcérés dans les prisons de l’Etat espagnol. Le dernier dossier rendu public par le Forum social permanent témoigne de la situation qu'affrontent les prisonniers basques.

La plupart des prisonniers basques en isolement se trouvent à Sevilla.
La plupart des prisonniers basques en isolement se trouvent à Sevilla.

Le régime le plus sévère du premier degré ("primer grado", en espagnol) est appliqué à 95% des prisonniers basques incarcérés dans l’Etat espagnol. Plus de 200 prisonniers doivent ainsi subir les mesures strictes appliquées dans le cadre de ce système. 27 prisonniers basques sont en isolement de manière permanente. Ces données ont été publiées dans le "Rapport sur les arrêts de refus de progression de degré" rendu public par le Forum social permanent.

Dans ce rapport, l’institution a également publié le témoignage d’un prisonnier incarcéré à Sevilla II, la prison qui compte le plus grand nombre de prisonniers isolés : neuf au total. Dans une lettre, le prisonnier raconte les conditions que vivent ces neuf détenus, séparés en deux modules. Dans chaque galerie, il y a dix cellules.

"Nous pouvons sortir dans la cour pendant quatre heures. Un jour de 9 heures à 13 heures, le lendemain de 15 heures à 19 heures", explique ce prisonnier dont l'identité n'est pas dévoilée. Autrement dit, il peut s’écouler 26 heures entre deux sorties. "Ce sont beaucoup d’heures à passer enfermé. Durant l’été, lorsqu’il fait très chaud, c’est étouffant, et en hiver, s’il n’y a pas de chauffage, c'est compliqué à cause de l’humidité", déplore le prisonnier.

"Lorsque nous sortons dans la cour, ils nous emmènent un par un. Cinq fonctionnaires nous mettent contre le mur et nous fouillent. Normalement et surtout ces derniers temps, les fonctionnaires sont plus tranquilles, moins agressifs même si parfois, certains d’entre eux nous provoquent en nous fouillant de façon plus agressive, ce qui crée des moments de tension", ajoute-t-il.

Certains détails dévoilés surprennent, comme l'absence de système de fermeture des fenêtres. "Il y a deux ans, ils ont enlevé les poignées, au motif que c'était dangereux car on pouvait agresser quelqu’un avec. Donc, pour les fermer, surtout en hiver lorsqu’il y a du vent et de la pluie, il faut trouver des astuces", raconte-t-il.

En hiver, le système de chauffage aussi pose problème. "Certains jours, le chauffage n'est allumé que pendant deux heures le matin et deux heures le soir. Dans certaines cellules, il n’y a même pas de chauffage", assure-t-il. Suite à des dépôts de plaintes auprès de diverses instances, les prisonniers ont obtenu que le chauffage soit allumé toute la journée.

Dans les cellules, les prisonniers ne peuvent pas posséder d'objets en métal, comme un coupe-ongles ou une lame de rasoir. Ils ne peuvent pas avoir, non plus, de canettes ou de boîtes de conserve. Tout est servi dans des verres et des assiettes en plastique. Les prisonniers du premier degré ont la possibilité d’acheter "moins de produits qu’au deuxième degré".

Les détails liés au service de produits externes sont également surprenants. Comme l’a expliqué le prisonnier, ce service fonctionnait assez bien jusqu’à l’année dernière. Mais il y a un an, "ils nous ont interdit de demander des fruits ou d'autres ingrédients comme la salade, les tomates, l'ail et l'oignon… sans aucune explication". Alors qu'avant, les prisonniers du premier degré pouvaient demander quatre kilos de fruits une fois tous les dix jours, aujourd’hui ils ne peuvent manger qu’un seul fruit par jour, celui donné lors du repas.

Etxerat dénonce

L’association Etxerat qui rassemble les familles des prisonniers a dénoncé les refus octroyés aux demandes de changement de degré formulées par les prisonniers basques. Depuis le mois de juillet, le Tribunal central de vigilance pénitentiaire a émis 47 décisions de refus "illicites" de demandes de progression de degré. Seules deux demandes ont été acceptées. "Jusqu’à quand allons-nous devoir continuer de payer les conséquences de décisions par lesquelles les autorités espagnoles violent leurs propres lois ?" a demandé Etxerat.