Valérie VALADE

A la rencontre de l’autre

K. Vogel, J.-P. Mari et M. Agier ont fait part de leurs témoignages.© Mathieu PRAT
K. Vogel, J.-P. Mari et M. Agier ont fait part de leurs témoignages.© Mathieu PRAT

Il y a un peu plus de deux ans, SOS Méditerranée, né d’une mobilisation citoyenne et d’un financement participatif, s’apprête à affréter l’Aquarius, en partenariat avec Médecins du monde, pour porter secours aux migrants qui tentent de traverser la Méditerranée dans des conditions périlleuses. Jean-Paul Mari, journaliste et écrivain, dont Les bateaux ivres a été publié en 2015 (JC Lattès), est convié pour “battre tambour”. Il parvient à réunir en un temps record les moyens financiers, humains, logistiques ainsi que de précieux partenaires comme la chaîne Public Sénat, pour réaliser un documentaire sur le navire.

Réalisé en 2016, le film poursuit sa route dans l’Hexagone, va à la rencontre des spectateurs et témoigne. A Bayonne, le 6 septembre, il a été projeté en présence de Jean-Paul Mari et du capitaine Klaus Vogel, co-fondateur de SOS Méditerranée, que l’on voit dans le film piloter et diriger les opérations avec un calme et une détermination sans limite.

Deux jours aux portes de l’Italie

Les migrants ne savent pas nager saisit d’abord l’attente inquiète de l’équipage avant son premier sauvetage, scrutant l’immensité d’une mer que l’on peine à croire si meurtrière. Le temps se dilate. Puis le signal radio se fait entendre. Le navire s’oriente vers le bateau pneumatique, guidé, de manière quasi surréaliste, par des dauphins. Des regards, des visages, des bras tendus pour attraper les gilets de sauvetage orange, un bébé porté de bras en bras : le premier sauvetage s’effectue dans le calme. Le deuxième est autrement plus tragique. Le canot se coupe en deux, des hommes disparaissent, happés par la mer, des mains s’agrippent, des “help !” déchirants arrivent de toutes parts.

A bord de l’Aquarius, quand la vie a repris, la caméra capte pudiquement la souffrance, la joie (“j’ai tout oublié, je suis né aujourd’hui”, s’écrie un survivant), des récits de vie poignants.

L’Aquarius, malgré les milliers de vies sauvées inlassablement, se heurte au raidissement croissant de politiques européennes qui lui compliquent encore la tâche. Que l’on se souvienne du ping-pong diplomatique en juin dernier lorsque, avec 630 migrants à son bord, le navire a dû attendre deux jours aux portes de l’Italie (et de la France) puis faire plus de 1 500 kms jusqu’à son port d’accueil, Valence.

Le besoin de forces vives

Un débat organisé par l’ARI (CNRS-EHESS, Bayonne), animé par Denis Laborde, a donné la parole après le film à des personnalités internationales sur le thème des migrations et de la solidarité. Contre les postures défensives des Etats, comme l’ont souligné les intervenants, de nouvelles formes sociales d’hospitalité se sont mises en place, grâce à la force des collectifs. Au Pays Basque, Solidarité Migrants / Etorkinekin, qui a ouvert la soirée, a rappelé son grand “besoin de forces vives et de moyens” pour continuer à accueillir et héberger des migrants, les accompagner dans leurs démarches et poursuivre des actions de sensibilisation auprès du public. Une réunion ouverte à tous aura lieu vendredi 21 septembre à 19h30 au Gaztetxe, quai de Lesseps à Bayonne.

– Infos
Pages Facebook : Solidarité-Migrants / Etorkinekin et SOS MEDITERRANEE France, site internet : www.sosmediterranee.fr/