Bénédicte Saint-André

Le Sénat enterre la charte des langues régionales

La motion d'irrecevabilité portant sur la ratification par la France de la charte européenne des langues régionales a été votée ce 27 octobre par le Sénat. Sur 341 votants et 335 suffrage exprimés, 180 sénateurs ont voté pour la motion, 155 contre. Le texte est donc rejeté avant d'être examiné, après cinq heures de discussion.

Frédérique Espagnac, sénatrice des Pyrénées Atlantiques et chef de file socialiste sur la question.© Gaizka Iroz
Frédérique Espagnac, sénatrice des Pyrénées Atlantiques et chef de file socialiste sur la question.© Gaizka Iroz

Le Sénat a voté sans surprise ce 27 octobre la question préalable sur la ratification de la charte des langues régionales et minoritaires. 180 sénateurs ont voté pour la motion, 155 contre. De fait, le projet de loi jugé non conforme avec la Constitution est enterré sans vote sur son contenu malgré un long débat entre les sénateurs.

Christiane Taubira, porteuse du projet de loi constitutionnelle, a en début de séance invité les sénateurs à "honorer la signature de la France" rappelant que 25 pays du Conseil de l'Europe ont déjà ratifié la charte. Selon la garde des Sceaux, le projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires est respectueuse du droit international.

Un avis que ne partage pas la droite sénatoriale majoritaire. Refusant de se positionner contre les langues régionales et risquer en cela des répercussions aux prochaines élections également régionales, les sénateurs de droite, menés par Philippe Bas, ont préféré attaquer sur l'angle constitutionnel. Ainsi, ils ont dénoncé "une annexe interprétative lacunaire". Selon eux, au lieu de faciliter la ratification comme elle en avait vocation, la déclaration interprétative qui date de 1999 amène un paradoxe juridique anticonstitutionnel.

Un problème également soulevé par certains défenseurs de la charte, jugeant comme le Conseil d'Etat que les deux textes "sont peu compatibles " et empêcheraient donc la mise en oeuvre effective de la charte.

Pour les socialistes au contraire, la déclaration interprétative ne remet pas en question le pacte républicain et ne pose aucun problème juridique. Selon eux, la ratification de la charte est la condition sine qua non de la protection des langues régionales et la possibilité d'envisager leur avenir de manière sereine.

Jean-Jacques Lasserre, sénateur UDI-UC des Pyrénées Atlantiques, Frédérique Espagnac et Georges Labazée, sénateurs socialistes des Pyrénées Atlantiques se sont tous trois prononcés en faveur de la ratification de la charte et donc contre la motion, soulignant la nécessité d'une politique volontariste en matière de langues régionales.

Pour autant, seize ans après sa signature et alors qu'un consensus sur les langues régionales semble atteint, la ratification de la charte parait inatteignable.