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Un accord tacite existait avec l'Etat français

Selon des informations du quotidien Gara, un accord tacite existait entre l'Etat français et les acteurs du désarmement afin que la journée du 8 avril se déroule de la meilleure façon possible.

Samedi, le procureur de Bayonne, Samuel Vuelta Simon, s'était rendu sur une des caches d'armes. ©Bob EDME
Samedi, le procureur de Bayonne, Samuel Vuelta Simon, s'était rendu sur une des caches d'armes. ©Bob EDME

Il y a bien eu un après Louhossoa. Et même si c’est surtout un élan des "artisans de la paix" et de la société civile qui a mené jusqu’à la journée du 8 avril, elle a aussi été possible grâce à deux canaux de dialogue - des contacts volontairement dissimulés - qui étaient en cours avec l’Etat français. Selon les informations du quotidien Gara, un accord existait entre les acteurs du désarmement et Paris. Un pacte ni écrit, ni public. Tel que Jean-René Etchegaray et Michel Berhocoirigoin, jusqu’au dernier moment, n’écartaient pas la possibilité d’opérations policières qui viendraient entraver le processus.

Pendant deux ans, le Gouvernement français aurait entretenu des contacts indirects avec des représentants d’ETA, pleinement conscient de la volonté de l’organisation de se désarmer unilatéralement. Il est d’ailleurs à noter qu’au cours de ces années, des voix exigeant un changement de position politique sur le cas basque se sont faites entendre au sein de l'exécutif. La plus importante étant celle de Christiane Taubira, ministre de la Justice entre 2012 et 2016.

Mais c’est après Louhossoa qu’un second canal de dialogue a été lancé. Impliquant les "artisans de la paix", le Gouvernement français, les institutions basques et la communauté internationale. Certains de ces contacts ont été mis en lumière publiquement, notamment par la presse. Comme la réunion du 20 mars à Pau entre Jean-René Etchegaray et le Premier ministre français, Bernard Cazeneuve. Ou encore la rencontre entre Jean-René Etchegaray, Iñigo Urkullu, Uxue Barkos et le coordinateur de la Commission internationale de vérification (Civ), Ram Manikkalingam, la semaine dernière à Gasteiz. Sauf ces deux exceptions, tous les contacts multilatéraux se sont faits confidentiellement.

Avec l'accord de François Hollande et Bernard Cazeneuve

La sénatrice PS Frédérique Espagnac, qui s’est exprimée ce matin sur France Bleu Pays Basque, l’a confirmé. L’Etat français s'inquiétant de la présence d’armes sur son territoire, était prêt à rentrer dans une discussion. "C’était certes une histoire espagnole d’abord. Néanmoins, ces armes étaient sur le sol français et il fallait, dans une période d’état d’urgence, régler ce problème." A la question de la validation de l’opération par Bernard Cazeneuve et François Hollande, Frédérique Espagnac confirme que les deux hommes ont donné leur accord.

Dans ce processus de désarmement, la priorité des autorités françaises était que l’accès aux armes, réparties sur huit caches, soit contrôlé. Et qu’il n’y ait aucune manipulation. Le 8 avril, les 172 "artisans de la paix" présents sur les lieux de remise de l’arsenal ne devaient à aucun moment toucher les explosifs ou les armes. En retour, il était essentiel d’assurer la sécurité de ces bénévoles contre toute intervention policière et judiciaire. Cet accord tacite a été respecté scrupuleusement samedi matin. Ce qui a contribué au succès de la journée qui s’est déroulée sans incidents. Le ministre de l’Intérieur, Matthias Fekl a dailleurs salué "un grand pas". Contrairement à son homologue espagnol.

De même, la déclaration d’ETA publiée dans la nuit de jeudi expliquant que l’organisation était désarmée n’a reçu aucune critique de Paris. Ce qui n'était pas le cas de Madrid. Jusque-là, l’Etat français suivait les directives de l’Etat espagnol à la lettre. L’opération du 16 décembre dernier semblait être une nouvelle preuve de cette solidarité franco-espagnole. Mais depuis, Paris s’est secrètement positionné en toute autonomie.