Bénédicte Saint-André

Des absents scellent la proposition de loi sur les langues régionales

La proposition de loi visant à protéger les langues régionales a été rejetée d'une voix jeudi 14 janvier. Seuls 24 députés étaient présents sur les 577 que compte cette législature. Et quatre absents socialistes ont fait basculer le scrutin, usant de la délégation de vote. Réactions.

Les députés des Pyrénées-Atlantiques n'ont pas voté la proposition de loi de Paul Molac. - © Gaizka Iroz
Les députés des Pyrénées-Atlantiques n'ont pas voté la proposition de loi de Paul Molac. - © Gaizka Iroz

A minuit jeudi 14 janvier, les députés ont rejeté la proposition de loi sur les langues régionales portée par le député écologiste Paul Molac. Seulement 10 députés socialistes étaient présents mais quatre absents ont délégué leur vote.
 
Une motion de procédure avait déjà permis d'enterrer la ratification de la charte des langues régionales au Sénat. C'est encore l'utilisation du règlement qui aura eu raison de la proposition de loi portée par le groupe écologiste de l'Assemblée nationale, lors de sa niche parlementaire.
 
Le texte d'abord vidé de sa substance en commission des Affaires culturelles et de l'éducation avait pu être rétabli jeudi. Les dix députés socialistes présents ne pouvaient dès lors contrer son adoption. Or au moment du vote final, alors qu'aucun député supplémentaire n'entrait dans l'hémicycle, le verdict tombe : 14 contre (tous socialistes), 13 pour (Marc Lefur, député LR, deux radicaux et 10 écologistes) et une abstention.
 
Le groupe socialiste a en effet enregistré quatre délégations de vote, celles de Christophe Sirugue, Yves Blein, Pascal Deguilhem et Pascal Terrasse, députés en mission. Si  cette procédure est interdite par le nouveau règlement, les députés malades ou en mission font effectivement exception à la règle. Or, en aucun cas elle ne reflète le vote du député. Parmi ces absents, certains au contraire étaient favorables à la proposition de loi.
 
Selon Paxkal Indo, président d'Eskolim (Seaska, Calandreta, Diwan, ABCM, Bressola), un tel recours n'honore pas les socialistes. Pire, si aucune loi cadre n'était adoptée d'ici la fin du quinquennat, ces derniers paieraient un lourd tribut de leur forfait.
 
Il souligne par ailleurs l'absence des trois députés des Pyrénées-Atlantiques lors du vote. Pourtant, "les 34 ikastola et les dix calandretas auraient eu le cadre nécessaire à leur développement, l'OPLB et l'OPLO se seraient vu confortés dans leurs actions, les gares et les postes du Pays Basque auraient pu renouveler leur signalétique en bilingue, France 3 Pays Basque aurait eu plus de moyens pour produire des émissions en basque", ajoute-t-il.

"Un échec annoncé"

Pour ces députés, cette défaite n'est pas à imputer à leur absence mais à la démarche jugée trop personnelle du député écologiste. Sylviane Alaux se refuse à "critiquer en creux l'action d'un collègue mais la manière employée par Paul Molac n'est pas la bonne". C'est également "l'histoire d'un échec annoncé" que relate Colette Capdevielle : "Sur cette question éminemment sensible, un coup politique ne peut aboutir. Nous devons être transpartisans, rassembler l'ensemble des acteurs du territoire, et faire travailler en amont toutes les personnes sensibles à cette problématique". 

 
Ella regrette en ce sens que Paul Molac n'ait saisi la commission des langues régionales, dont il est pourtant le vice-président, et que n'ait été abordé que l'immersif gratuit "concernant les diwan mais pas les ikastola". La sénatrice Frédérique Espagnac, interrogée par France 3, est sur la même ligne bien qu'elle fustige la méthode utilisée par les socialistes pour sceller le vote. Assurant que la question des langues régionales reste une priorité, toutes trois appellent à reprendre le travail collectivement dans les six mois.