Antton ETXEBERRI

"Important responsable de l’appareil politique de l’ETA" ?

Antton Etxeberri
Antton Etxeberri

Deux semaines jour pour jour après les arrestations de Baigorri, les gouvernements français et espagnol, par les écrits des deux ministres de l’Intérieur Bernard Cazeneuve et Jorge Fernandez Diaz, annoncent l’interpellation ce mardi matin en Seine-Saint-Denis, d’"un important responsable de l’appareil politique de l’ETA, Egoitz Urruticoechea". Après avoir annoncé la décapitation d’ETA, voilà donc un nouveau "responsable" interpellé, selon eux.

Quelques minutes avant la publication de ce communiqué de presse, des organes de presse annonçaient, selon des sources policières, qu’Egoitz Urrutikoetxea vivait dans la région parisienne, et suivait des cours à l’université, à Paris. Il est difficile de croire que des militants actifs d'ETA dans la clandestinité puissent être inscrits dans une université, d’autant plus s’il s’agit d’ "important responsable" de la structure. Ces sources policières enfoncent même le clou en précisant qu’Egoitz Urrutikoetxea est "complètement détaché de l’ETA". Propos quelque peu contradictoires avec ceux des ministres. Il semble que les ministres de l’Intérieur français et espagnol se soient une fois de plus précipités à rédiger leur communiqué commun. La même précipitation les avaient amenés à procéder, au mois de mars 2014, à Berrogain-Laruns, à l’interpellation d’un individu qu'ils présentaient comme Egoitz Urrutikoetxea. Il s’avérait au final n’être qu’un Souletin qui faisait son jogging dans la forêt, et qui a eu le tort de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment.

Les ministères de l’Intérieur, qui vont sans doute s’obstiner à justifier leurs propos malgré les évidences, ont pour unique objectif de mettre en avant une fois de plus l’entente parfaite entre les polices des deux pays, afin de venir à bout d’ETA. Ce communiqué de presse, rendu public quelques heures à peine après l’arrestation, tend aussi et surtout à satisfaire le PP à la tête du gouvernement espagnol, qui s’est donné pour objectif d’arriver devant les électeurs dans les meilleures dispositions possibles, le 20 décembre prochain, pour des élections législatives redoutées.

De par la symbolique que son nom porte, Urrutikoetxea est une proie très "intéressante" pour la communication du gouvernement espagnol. Certes, Egoitz Urrutikoetxea fait l'objet de deux inculpations à quatre années de prison prononcées par le Tribunal correctionnel de Paris en 2007 et 2009 pour des faits liés à l’ETA. Mais, au-delà, son arrestation sera un élément de plus qui fragilisera le processus de paix au Pays Basque, la succession des coups répressifs, dont se félicitent les gouvernements espagnol et français, peut créer un sentiment de désolation au sein de la population du Pays Basque, et amener le processus dans une impasse. L’engagement et les mobilisations du Pays Basque en faveur de la paix devront se multiplier pour obliger les gouvernements à se retrouver autour de la table.