Justine Giraudel

L 'Observatoire des violences faites aux femmes comble le vide du CIDFF

La liquidation judiciaire du CIDFF des Pyrénées-Atlantiques a été décidée le 19 février dernier par le Tribunal administratif de Pau. Au Pays Basque, les partenaires sont prêts à prendre la relève. Une dynamique locale pour pallier les carences opérationnelles liées à une question urgente et sensible : les violences faites aux femmes.

Rassemblement contre les violences sexistes à Bayonne - © Bob EDME
Rassemblement contre les violences sexistes à Bayonne - © Bob EDME

Jeudi 19 février, le Tribunal administratif de Pau annonçait la liquidation judiciaire du Centre d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) des Pyrénées-Atlantiques. Ce qui n'a étonné ni Martine Bisauta, ni Sylviane Allaux (PS), deux élues qui suivent attentivement le dossier.

Cette décision arrive après des années de tension. Pour la députée socialiste : "Il était temps que le tribunal assainisse et clarifie la situation". "En trois ans nous avons tiré toutes les sonnettes d'alarme", confie par ailleurs l'adjointe au maire de Bayonne M. Bisauta, "nous [l'Observatoire des violences faites aux femmes], les salariées, Mme la député à Paris".

Suite à une gestion financière qu'elle qualifie "d'hasardeuse", les permanences rurales du CIDFF ont petit à petit disparu. Il ne restait plus que deux antennes, à Pau et à Bayonne. La structure, pourtant vidée de son pouvoir exécutif, maintenait son activité et ce malgré un déficit de 90 000 euros. Relevant des compétences de l’État, financé par des accords préfectoraux, ce dispositif est conduit à un niveau départemental.

A l'heure actuelle, deux salariées sont toujours en poste : la directrice, à Pau, et la juriste qui s'occupait de l'antenne bayonnaise. Cette dernière attend que lui soit notifié son licenciement et continue, pour le moment, son travail d'orientation et d'information.

Un numéro téléphonique local (05 59 46 40 86) à destination des femmes victimes de violences existe depuis 2012. Lancée par l'Observatoire des violences faites au femmes (outil dont l'élue bayonnaise est l'une des instigatrices), cette alternative au 3919 permet d'entrer en contact avec des travailleurs sociaux du territoire et améliore la prise en charge.

Car les difficultés concernant cette question au Pays Basque datent, témoignent S. Allaux et M. Bisauta. "Près de 600 appels par an sont passés à l'antenne du CIDFF de Bayonne". Si les élues soulignent le "travail unanimement reconnu" de la salariée, la charge entière d'un tel dispositif ne pouvait incomber à une seule personne (elles étaient six à Pau). Pour pallier ces carences, liées "à une bicéphalité départementale qui n'est pas reconnue", l'idée d'un Observatoire a été développée.

Les bâtons dans les roues

Croiser le regard de l'ensemble des acteurs concernés et trouver des solutions de façon conjointe : tel est l'objectif de ce regroupement. Parquet, associations, municipalités, hôpitaux, police et gendarmerie, tous ont répondu à l'appel. En 2013, l'Observatoire signait une convention de Groupement d'Intérêt Public qui n'a pu voir le jour qu'en novembre 2014, après une bataille administrative. "Nous avons eu des bâtons dans les roues de la part de la Préfecture qui, à mon avis et cela n'engage que moi, a mal perçu une organisation à l'échelle territoriale du Pays Basque" explique M. Bisauta.

Si l'idée originelle était d'effectuer un état des lieux et d'améliorer les passerelles entre acteurs, grâce au dialogue, "maintenant, devant la situation actuelle et l'urgence, nous allons devoir recruter" ajoute-t-elle. La député la rejoint sur la pertinence de ce GIP et dit avoir contacté dans ce sens Pascale Boistard (secrétaire d'Etat chargée des droits des femmes) : "N'est-il pas temps de regarder la réalité de notre territoire et de s'apercevoir qu'il y a un organisme qui est aujourd'hui le seul relais pour les femmes maltraitées au Pays Basque ?"

L'action du GIP s'étend, le partenariat prend, semblant répondre aux besoins sensibles d'une question qui l'est tout autant. Les élus s'emparent aussi de la question. Dans un premier temps, il s'est tourné vers les communes de Saint-Jean-de-Luz et d'Hendaye, qui ont mis en place leur propre dispositif (bien que cela ne soit pas dévolu aux compétences municipales). Soutenu par Bayonne, les autres communes de l'ACBA l'ont rejoint, ainsi qu'Hasparren. D'autres encore pourraient rallier le mouvement. Elles ont accepté d'attribuer une aide à hauteur de 20 centimes par habitants, qui s'ajoute aux 5 000 euros alloués par le département.

Des fonds nécessaires pour la création d'un maillage territorial pour le droit et l'accès au droit des victimes, la formation des médecins, l'information et la sensibilisation auprès des jeunes. Une conception large de l'action contre les violences, qui englobe un projet transfrontalier autour de la question de la prostitution. 

Les signataires de la convention du GIP :

L’Etat, le département des Pyrénées-Atlantiques, le Centre Hospitalier de la Côte Basque, les Villes d’Anglet, Bayonne, Biarritz, Bidart, Boucau, Hasparren, Hendaye, Saint-Jean-de-Luz et les associations locales, le Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles 64, Atherbea, Aides, Association Citoyenneté Justice Pays Basque, Planning Familial, le Collectif féministe contre les violences sexistes et le Collectif des femmes en Pays Basque.