Goizeder TABERNA
Entrevue
Jean-René ETCHEGARAY
Maire de Bayonne, Président de l’Aggloméartion Côte Basque Adour

“Je suis toujours pour la collectivité territoriale, mais il faudra peut-être passer par la case intercommunalité”

Ces dernières années, Jean-René Etchegaray s'est engagé en faveur de la collectivité territoriale spécifique Pays Basque, notamment, à travers la plateforme Batera. Aujourd’hui, par “principe de réalité”, il est prêt à accepter la création d’une communauté d’agglomération ou d’une communauté urbaine Pays Basque, comme l’a proposé le préfet André Durand en juin.

Le président de l'Acba Jean-René Etchegaray voit d'un bon oeil la création d'une intercommunalité Pays Basque
Le président de l'Acba Jean-René Etchegaray voit d'un bon oeil la création d'une intercommunalité Pays Basque

Récemment encore, vous défendiez la collectivité territoriale spécifique face aux propositions du préfet des Pyrénées-Atlantiques. Aujourd’hui, quelle est votre position par rapport à une intercommunalité qui regrouperait tout le Pays Basque Nord ?
Je continue à considérer que la solution pour la reconnaissance institutionelle pour le Pays Basque passe par une collectivité territoriale spécifique, que la Constitution française rend possible. Cela dit, je suis comme toute personne imprégnée du principe de réalité, s’il fallait passer par une étape qui s’appelle l’intercommunalité, j’en appellerais à la création d’un nouveau modèle juridique à l’échelle de l’ensemble du territoire Pays Basque. Avec les règles de gouvernance actuelles des intercommunalités, on aboutirait à une solution qui n’est pas constitutionnelle.

Où se trouve l’inconstitutionnalité ?
Elle tient au fait que si on crée une “interco” à l’échelle du Pays Basque, on aurait une sous-représentation des territoires les plus importants sur le plan démographique.

Il existe des intercommunalités dans l’État français qui ont adapté leur système de représentativité à leur diversité démographique.
Aujourd’hui, ce qui est certain, c’est que si on met en place un dispositif avec une représentation qui serait conforme à ce que prévoit le Code général des collectivités territoriales pour les communautés d’agglomération et les communautés de communes, on aboutirait à une distorsion entre la population et la représentation. Or, constitutionnellement, on ne peut pas prévoir une représentation qui ne soit pas fidèle au poids démographique.
Maitenant, on peut imaginer qu’il ne soit pas tenu compte que du poids démographique. La Soule, par exemple, qui a 14 000 habitants, doit avoir plus de représentants que ce que sa population pourrait lui permettre. Donc il doit exister des correctifs. Il faut que le système de représentation puisse permettre de corriger la représentation exclusivement démographique, pour qu’il y ait une véritable solidarité entre l’intérieur et la côte.

On pourrait donc éviter l’inconstitutionnalité ?
Oui. Trois décisions du Conseil constitutionnel sont venues valider le principe de correctif de solidarité en matière de représentation strictement démographique. Je ne suis pas en train de dire qu’il ne faut tenir compte que de la démographie, mais on ne peut pas faire fi de la démographie.
Si l’on appliquait strictement la loi actuelle sur une communauté d’agglomération à l’échelle du Pays Basque, il y aurait 33 délégués pour la Soule et il y en aurait 53 pour l’Agglomération côte basque Adour (Acba).

Vous venez de démontrer que ce n’était pas vraiment un problème finalement…
Non, ce n’est pas un problème. Souvent, on n’a pas compris mon intervention dans cette affaire, on a cru que j’étais contre la proposition du Préfet par principe. Je suis toujours pour la collectivité territoriale, j’estime, néanmoins, qu’il faudra peut-être, pourquoi pas, passer par la case intercommunalité. Encore faut-il que, pour que cette solution soit viable, l’on adapte les règles de gouvernance.

Quel modèle d’EPCI privilégiriez-vous : le model fédératif ou intégré ?
Je suis pour un modèle intégré. Je voudrais aussi ajouter qu’il faut qu’on réfléchisse à l’avenir institutionnel du Pays Basque à l’aune de ce que sera la future région Aquitaine. Une région qui va aller jusqu’au Limousin, qui aura 680 kilomètres de long… La question est de savoir comment nous allons pouvoir exister dans cette nouvelle région. Il faut se saisir de l’occasion, de ce débat sur l’institution pour faire en sorte que l’intercommunalité que l’on veut mettre en place soit un moyen de peser dans la région de demain.

L’Acba pourrait être un territoire dans le territoire. Quel serait son rôle, sa place dans une intercommunalité plus ample ?
L’agglo doit avoir toute sa place mais que sa place. Elle ne doit pas être omniprésente, omnipotente. Il est hors de question de ne pas tenir compte des identités de chaque territoire. C’est pour cela que je considère que l’organisation que l’on mettrait en place doit respecter la réalité de chaque territoire. Ce n’est pas une question de taille, c’est une question de projet. Je rêve que le Pays Basque puisse avoir le même projet de développement.