Béatrice MOLLE-HARAN

Procès pour viol à Iruñea ou quand les bourreaux se victimisent

Le procès des cinq Sévillans accusés de viol et de vol de portable à l’encontre d’une jeune fille de 22 ans lors des fêtes de San Fermin le 7 juillet 2016 se poursuit à Iruñea avec l’audition des prévenus, dont un guardia civil et un militaire. Tous nient les faits malgré des preuves accablantes.

Objectif de la défense des accusés, accréditer la thèse que la jeune fille était consentante et que ces bourreaux ordinaires sont en fait de pauvres victimes injustement poursuivies par la justice.

De fait, la semaine dernière, une polémique a surgi lorsque le tribunal de Navarre a accepté sur demande de la défense des présumés violeurs de verser au dossier une vidéo filmée par un détective privé et montrant la jeune fille dans ses activités diverses et sur les réseaux sociaux dans les mois suivants le viol qu’elle avait subi. La défense des prévenus voulait ainsi démontrer que la jeune fille “n’était pas si traumatisée que cela et vaquait à ses occupations journalières”.

Projection polémique

Dans un premier temps, seuls quelques extraits de ce rapport ont été pris en compte tant la polémique a enflé. Et au final, l'avocat de la défense les a retirés. Car il est tout de même curieux que la victime présumée ait à rendre des comptes sur sa vie privée. Autre fait marquant, le refus des accusés de répondre aux questions de la mairie d’Iruñea et du gouvernement foral de Navarre qui se sont portés parties civiles dans cette affaire. L’avocat de la défense estimant que ses clients n’avaient pas à répondre à des questions émanant d’institutions politiques.

Analyse des vidéos

Par ailleurs, le summun fut atteint avec la comparution d’un psychologue qualifié “d’expert en gestuelle”, cité par la défense et qui a apporté “son analyse” sur la vidéo de la scène filmée par les propres présumés violeurs qui comptaient l’envoyer à leurs groupes d’amis. Une vidéo qui selon lui prouve que la jeune fille n’était pas en état de choc, qu’il s’agissait “d’une relation perverse à laquelle aucun des participants n’avaient pris un réel plaisir”. Version contredite par le jeune couple qui a découvert, après la commission des faits, la jeune fille pleurant sur un banc ainsi que par la police forale venue à son secours. Police forale qui avait procédé à son premier interrogatoire soulignant que la jeune fille était en état de choc. Pour l’avocat de la jeune fille, ces vidéos, sept au total, sont insoutenables et point besoin d’être grand spécialiste en psychologie pour savoir que dans des situations d’extrême danger la priorité devient la préservation de la vie à n’importe quel prix.

Ce procès démontre une fois de plus que dans ce type de procédure, on demande encore aux femmes et victimes de violences et de viols de se justifier de ce qu’elles ont subi.