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Fresnes : l'OIP saisit de nouveau la justice

Malgré de nombreuses alertes dénonçant des conditions d'incarcération indignes au sein de la Maison d'arrêt du Val-de-Marne, rien ne change. L'Observatoire international des prisons (OIP) assigne de nouveau l'Etat en référé. 

Les parloirs, surchargés et également qualifiés d'"indignes" tant pour les détenus que pour les visiteurs © JC Hanché
Les parloirs, surchargés et également qualifiés d'"indignes" tant pour les détenus que pour les visiteurs © JC Hanché

Surpopulation, locaux insalubres et infestés de rats et de punaises de lits, cellules de 9 m² accueillant régulièrement trois personnes, insuffisance de l'offre d'activités et de travail, violences exacerbées... Ces derniers mois, l’OIP, Observatoire international des prisons, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté Adeline Hazan et, tout récemment, le Comité européen pour la prévention de la torture ont, tour à tour, alerté sur l’indignité des conditions de détention à la Maison d’arrêt de Fresnes. Au mois de mars 2017, le taux d’occupation de l’établissement s’élevait à 193,1%, avec 2 556 personnes détenues pour une capacité opérationnelle de 1 324 places.

Des années d’alertes

En 2012, le contrôleur des prisons dénonce déjà "la vétusté des locaux, la surpopulation, les conditions d’accueil des visiteurs aux parloirs". Entre 2013 et 2014, Christian Cambon, sénateur du Val-de-Marne alerte le gouvernement sur le manque d’effectif du personnel pénitentiaire, la surpopulation et le climat de violence qui régnait au sein de l’établissement. Le 22 décembre 2016, il interpelle à nouveau la ministre de la Justice sur l’état de délabrement de la prison. Sans réponse à ce jour.

Au même moment, Adeline Hazan relève, dans des recommandations délivrées en urgence, "un nombre important de dysfonctionnements graves qui permettent de considérer que les conditions de vie des personnes détenues constituent un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme". Enfin, dans un rapport faisant suite à une visite réalisée en novembre 2015 et publié le 7 avril dernier, le Comité européen pour la prévention de la torture - émanation du Conseil de l'Europe - confirme dans les mêmes termes l’indignité des conditions de détention à Fresnes, pointant la surpopulation, les violences et mauvais traitements, l’insalubrité des conditions de détention, l’absence d’activités et l’usage abusif des fouilles intégrales.

Des demandes restées sans réponses

En octobre 2016, l’OIP a déjà saisi la justice sur la présence de rats, puces et punaises de lit dans l’établissement. Le juge, constatant que les détenus étaient exposés à d'importants risques sanitaires ainsi qu'à des conditions d’incarcération contraires à la dignité humaine, a demandé l’intensification de mesures de dératisation. Dans un rapport publié en décembre, Adeline Hazan constate que "les rats évoluent en masse au pied des bâtiments, dans les cours de promenade et aux abords des bâtiments tout au long de la journée. On ne peut éviter de piétiner leurs excréments. L’odeur persistante de leur pelage, de leurs excréments et de leurs cadavres s’ajoute à celle des amas d’ordures qui jonchent le pied des bâtiments".

Depuis cinq mois, par cinq courriers, l’OIP a demandé au directeur de l'établissement de le tenir informé des actions engagées pour assurer l’exécution de l’ordonnance du tribunal. Sans succès. De son côté, la Contrôleure générale, Adeline Hazan a considéré en décembre dernier que les réponses apportées par le ministre de la Justice à ses recommandations étaient "largement insuffisantes, vagues et convenues" et ne sauraient être considérées "à la hauteur des enjeux évoqués".

L’OIP déclare donc se trouver contraint aujourd’hui, une nouvelle fois, de saisir le juge des référés du tribunal administratif de Melun, avec le soutien des barreaux de Paris, du Val-de-Marne, de Seine-Saint-Denis et des Hauts-de-Seine, du Syndicat des avocats de France, de l’Union des jeunes avocats de Paris et de l’Association des avocats pour la défense des droits des détenus. Il est demandé la mise en œuvre d’un plan d’urgence. Et que "l’administration prenne enfin des mesures concernant tant les conditions de détention matérielles – à savoir l’état des cellules, la rénovation des cours de promenade, des salles d’attente, des parloirs, –  que le climat de violence dans lequel se trouvent les personnes détenues, la systématicité des fouilles à corps, le manque de personnel et le manque d’activité". 

Cinq détenus basques (trois hommes et deux femmes) sont incarcérés à Fresnes.