Goizeder TABERNA

Des milliers de doigts levés en faveur des détenus basques

Près de 78 000 personnes ont demandé le retour des détenus basques et le respect de leurs droits, à Bilbo. Une manifestation qui a su rassembler, malgré l'absence de certains partis.

"Levons les doigts, qu’ils nous entendent dans tous les coins du monde, depuis l’Espagne, depuis la France. Moi je dénonce, nous nous dénonçons, le Pays Basque dénonce !", ont scandé au micro les organisateurs de la manifestation. Les familles des détenus basques sont à la tête du cortège, le doigt levé. "Je dénonce", dit la pancarte qu'elles tiennent, de la forme d’un index levé. En ce 14 janvier, elles n’ont pas pris la voiture pour se rendre dans les prisons, mais pour se retrouver à Bilbo, pour la traditionnelle manifestation en faveur des détenus basques organisée par le mouvement civil Sare.

Les "mirentxin" non plus n’ont pas pris la direction des centres pénitenciers. Toutes les fins de semaine, ces camionnettes transportent les familles et amis des 347 détenus basques que comptent les prisons françaises et espagnoles. Le plus éloigné, celui d’Algeciras, à 1 101 kilomètres du Pays Basque.

Sur les côtés, une masse compacte de manifestants leur a ouvert la voie. Le cortège s’est lancé dans l’avenue Autonomia à 17h50. Entre pluie et éclaircies, dans le froid, il est arrivé à la place de la mairie un peu plus d’une heure plus tard.

La première banderole blanche résume la revendication commune des 78 000 personnes réunies, selon les estimations de Gara : "Droits humains, paix, résolution. Libération des prisonniers basques". Un message adressé aux gouvernements espagnol et français. Derrière, treize personnalités de la société basque impliquées dans la résolution du conflit, dont la conseillère régionale EELV et membre du collectif Bagoaz, Alice Leiciagueçahar.

Pluralité et affluence

A ses côtés, l’ancien conseiller du gouvernement de la Communauté autonome basque (Cab) Joseba Azkarraga, l’avocate Elisabete Bizkarralegorra, la victime du GAL Edurne Brouard, proche d’un détenu basque gravement malade Gentzane Callejo, l’ancienne détenue Mertxe Galdos, les bertsulari Unai Iturriaga et Alaia Martin, le peintre Xabier Morras, l’ancien détenu Juan Mari Olano, la victime d’ETA Rosa Rodero et le professeur d’université Ramon Zallo.

Malgré l’absence des représentants des institutions et de certains partis, basques, espagnols ou français, les organisateurs ont mis en avant la diversité des personnes soutenant l’appel. Cette pluralité et cette affluence ont été d’autant plus grandes ces cinq dernières années qu’ETA a cessé la lutte armée et s’est dit prête à se désarmer.

Indépendamment de leurs partis, quelques personnalités politiques ont pris position en faveur de la revendication du jour. Le dirigeant de Podemos Iñigo Errejo l’a fait sur Twitter. Il a emboîté le pas à l’ancien président de la Cab Juan Jose Ibarretxe (PNV). "L’Espagne applique 'à la carte' le droit pénal de l’ennemi, qui est le 'non droit'. L’éloignement doit cesser", écrit l'ancien Lehendakari.

 

 

Une phrase également prononcée par les personnes qui ont lu le texte final, les présentateurs de télévision Nerea Alias et Andoni Aizpuru. "Oui, oui, oui, nous dénonçons !", ils ont répété en coeur cette phrase à chaque atteinte de droits fondamentaux égrenée. Les deux intervenants ont appelé la société basque à rester vigilante vis-à-vis des entraves à la résolution du conflit.

Devant la mairie de Bilbo, Sare a réitéré l’appel à s’engager dès demain en faveur de ce qui a rassemblé tant de monde, ce samedi. "La paix juste et définitive est un travail collectif qui dépasse les clivages politiques", ont-ils insisté, "il ne s’agit pas d’oublier, regardons vers l’avenir, sans vengeance, sans haine, vivons en paix et en liberté". Samedi prochain, les familles des détenus reprendront la route avec l’assurance qu’au Pays Basque, des dizaines de milliers de personnes ont le doigt levé. Avec le sentiment que 2017 sera une année décisive.