Virginie Bhat

Le Fipa crève l'écran

Du 24 au 28 janvier prochains, Biarritz accueille le Fipa qui cette année célébrera ses trente ans. Une nouvelle fois, le festival, fenêtre sur le monde, explore la télévision de demain.

"Inkotanyi" de Christophe Cotteret plonge le spectateur dans le génocide du Rwanda. ©Fia
"Inkotanyi" de Christophe Cotteret plonge le spectateur dans le génocide du Rwanda. ©Fia

"Le Fipa 2016 fut un Fipa de diagnostic : il a mis le doigt là où cela faisait mal. Cette année, nous présenterons plutôt des films de thérapie où l'homme vient au secours de l'homme", explique Didier Decoin, le président du festival qui soufflera ses trente bougies. Dont vingt et une allumées à Biarritz.

Pour ses trente ans, ce sont quelque 1 500 œuvres, films, documentaires, courts-métrages que l'équipe a regardées. Parmi lesquels elle a dû choisir. Et du chapeau, 123 ont été sélectionnées que le public pourra découvrir du 24 au 28 janvier prochains. Avec sous les feux de la rampe, le Canada.

Les femmes

Il y a des œuvres qui portent sur leurs épaules le courage, justement pointées du doigt par Didier Decoin. "Noma", un film de Pablo Pinedo Bovéda, raconte l'histoire de cette jeune femme noire qui n'a qu'un rêve : construire sa maison. Elle a tout contre elle dans cette Afrique du Sud de l'après-apartheid : travailleuse précaire, elle vit dans un ghetto. Et pourtant, elle parviendra à l'avoir sa première maison. Et du courage, Noma en aura à revendre qui devra subir une première expulsion par la police où sa maison vole en éclats, puis une seconde…

Noma n'est pas la seule femme de la sélection du Fipa à prendre son destin en main, à s'engager, à apporter générosité et espoir aux autres... "Des personnages féminins qui essaient de faire bouger les lignes", commente François Sauvagnargues, délégué général du festival.

Des femmes qui aussi membres ou présidentes des différents jurys seront amenées à apprécier la qualité des œuvres qui leur seront présentées dans chaque catégorie fiction, série, documentaire de création, grand reportage et investigation, musique et spectacle, Smart Fipa. Deux prix couronneront  la jeune création : le prix Mitrani et nouveauté 2017, le prix Erasmus +.

"Parmi les documentaires, une thématique est abordée : le populisme, la crise de confiance avec les dirigeants", note le délégué général du Fipa. Populisme, mais aussi vie des opposants à Poutine, portraits de maire de Barcelone ou de New-Delhi, le génocide du Rwanda relaté par Inkotanyi, une oeuvre de Christophe Cotteret "qui va un peu à l'encontre de ce qui est accepté comme version officielle en France". Et de souligner que ce sont des oeuvres qui dialoguent entre elles.

Nouvelles tendances

"Le Fipa est aussi là pour décrypter les tendances de la télévision, remarque François Sauvagnargues, de mettre l'accent sur la jeune création où les modes de filmage font appel aux nouvelles technologies et nouveaux usages." 

Dans les nouveaux usages, le film d'ouverture du Fipa y plongera directement les spectateurs. "Ils devront venir avec leur smartphone, s'amuse déjà le président. Nous pourrons ainsi changer le scénario comme nous le voulons. Cela ne s'est jamais fait dans une salle aussi grande que celle de la gare du Midi."

L'oeuvre en question ? "Tantale" de Gilles Porte surfe en plus sur l'actualité : dans les couloirs secrets de l'hôtel Carlton, le président de la République et de nombreuses autres personnalités doivent désigner la prochaine ville organisatrice des Jeux Olympiques d'été… "Dans 'Tantale', c'est à vous de choisir : vous êtes le Président", promet le festival.

C'est le Smart Fipa, une nouvelle fois, l'écrin des nouvelles technologies que la télévision explore. Ouvert au public, le Smart Fipa qui l'année dernière abordait la narration sensorielle s'attaque cette fois-ci à la narration au-delà de l'écran. En fait d'écran, il n'en y a plus. Les personnages quittent le poste de télévision ou la tablette pour s'imposer dans la réalité sous forme d'hologrammes. Et le spectateur de s'inviter cette fois-ci dans leur histoire. Qui est alors acteur ?

Avec un budget constant de 1,3 million d'euros, le Fipa espère mettre les compteurs d'audience plus haut que l'année dernière. Une année où 25 000 spectateurs avaient franchi son seuil.