Justine Giraudel

Les profs de collège passent à l'action

En disparaissant de la case des "disciplines", l'enseignement du basque et en basque serait particulièrement mis en danger par la nouvelle réforme des collèges, appliquée pour la rentrée 2016.

Les enseignants rappellent qu'à ce jour, l'école reste le principal espace de pratique de la langue. © Isabelle MIQUELESTORENA
Les enseignants rappellent qu'à ce jour, l'école reste le principal espace de pratique de la langue. © Isabelle MIQUELESTORENA

Si les principaux des collèges, le recteur d'académie de Bordeaux et le Dasen se veulent rassurants, l'inquiétude monte chez les enseignants de basque : l'application de la réforme des collèges, prévue pour la rentrée 2016, pourrait être fatale à la langue basque. Les profs montent au créneau et réclament la reconnaissance de l'enseignement des langues régionales comme une discipline à part entière.

Une vingtaine de professeurs de basque, venus des différents collèges du territoire, ont présenté leurs réclamations pour enrayer ce qu'ils estiment être un affaiblissement de leur enseignement, dans le cadre de la réforme des collèges prévue pour la rentrée 2016. En premier lieu, ils demandent que "l'enseignement du et en basque soit reconnu comme une discipline à part entière". Ce qui passe par "un cadre légal et réglementaire, et non des solutions négociées chaque année, par chaque établissement".

La langue basque intégrant le bloc des enseignements de complément (notamment par le bais des EPI, enseignements pratiques interdisciplinaires), la nouvelle réforme ferait disparaître toute garantie quant à son maintien. "Nous souhaitons un dispositif commun à tous les établissements et à tous les niveaux, expliquent-ils, des grilles et des horaires spécifiques". De même, les EPI ne commençant qu'à partir de la classe de cinquième, ils s'inquiètent des conséquences de cette rupture d'enseignement.

Interrogé par la rédaction de MEDIABASK, le recteur avait répondu que la continuité pourrait être assurée via les heures "d'enseignement personnalisé" prévues en classe de sixième, "éventuellement, si on fait du basque dans cet établissement (...)". Les profs, eux, souhaitent que l'option soit rétablie, purement et simplement.

La difficulté semble résider dans une forme de "mise en concurrence" entre les différentes disciplines, et dans leur association. Huit thèmes de travail sont proposés pour composer les fameux EPI : corps, santé, et sécurité, ou culture et pratiques artistiques, ou encore, "le cas échéant", "langues et cultures étrangères et langues régionales". Ce conditionnement a achevé de mettre le feu aux poudres.

En octroyant 20 % d'autonomie de moyens et d'organisation supplémentaires aux établissements, explique une enseignante, la réforme des collèges accroîtrait "les différences d'un collège à l'autre". Si des aménagements sont possibles, encore faut-il qu'ils puissent être financés, ou qu'ils soient validés, ajoute une autre.

L'enseignement de la langue basque, bilingue ou optionnel, serait ainsi soumis aux aléas des négociations au sein de l'équipe pédagogique, avec le conseil d'administration… ou même avec l'emploi du temps des élèves, qui répond à un quota d'heures. Négociations réitérées, chaque année. Et le temps presse : les projets pédagogiques de la rentrée 2016/2017 devraient être bouclés en janvier, avertit une enseignante.

"Le problème touche toutes les langues régionales"

Les arguments sont techniques, les calculs entre académie et enseignants se confrontent. En tout état de cause, qu'il soit divisé par deux pour le troisième cycle et disparaisse au niveau de la sixième (comme argumentent les enseignants) ou potentiellement maintenu en additionnant les différentes combinaisons possibles (comme le défendent recteur et Dasen), l'enseignement en langue basque ne bénéficierait d'aucune garantie en tant que discipline à part entière.

"Le problème touche toutes les langues régionales, affirme une enseignante, et nous formulons tous les mêmes demandes." La dernière étant le maintien et le développement de l'enseignement bilingue, à parité horaire. La conférence de presse organisée ce mercredi 7 octobre marque le lancement "d'une mobilisation en faveur d'un cadre légal et réglementaire qui garantit la transmission de la langue basque à l'école élémentaire et au collège".

Les enseignants ont d'ores et déjà demandé un rendez-vous à l'Office public de la langue basque, ainsi qu'aux parlementaires du territoire et participeront, le 24 octobre prochain, à la manifestation Deiadar réclamant "un statut pour nos langues". Car, rappellent-ils, "pour stopper le déclin de l'euskara, le système éducatif doit s'en donner les moyens. On ne peut pas réduire les exigences pour pouvoir former des locuteurs complets".