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S. Alaux : 'La France s’en tirerait grandie de lui accorder cette suspension de peine'

La députée PS Sylviane Alaux s'est rendue avec la députée de Paris EELV, Cécile Duflot, à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, la semaine dernière. Elles ont rendu visite au détenu basque gravement malade, Oier Gomez. Sylviane Alaux revient sur cette visite. Une lettre a été envoyée au garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, ce matin pour demander la suspension de sa peine.

Sylviane Alaux et Cécile Duflot ont rendu visite à Oier Gomez, la semaine dernière. ©Bagoaz
Sylviane Alaux et Cécile Duflot ont rendu visite à Oier Gomez, la semaine dernière. ©Bagoaz

Quel était l’objet de cette visite ?

Sylviane Alaux : J’y suis allée parce que ce garçon est en danger. Certes, il est condamné mais il est malade, très malade. Donc j’avais besoin d’aller le voir, de lui dire qu’il n’était pas seul dans son combat aujourd’hui. Je voulais un témoin parce que je ne voulais pas y aller seule comme j’avais fait une première fois avec Lorentxa [Guimon]. Cette fois j'ai emmené avec moi Cécile Duflot. J’avais également demandé une entrevue avec le médecin chef qui le suit, avec l’équipe médicale. Il s’avère effectivement que même l’équipe médicale atteste, affirme, que l’état de santé d’Oier et les traitements dont il fait l’objet sont totalement incompatibles avec la détention.

Les juges ont nommé un expert qui est déjà passé. Cet expert doit remettre en principe son compte-rendu très rapidement, à la demande de l’équipe médicale, pour qu’une solution soit trouvée. J’étais intervenue une première fois auprès du garde des Sceaux pour qu'on le radie du fichier des PSS [prisonniers sous surveillance], ce qui a été fait le 2 mars. Mais maintenant, nous oeuvrons pour qu’il y ait une suspension de peine.

Est-ce que vous savez où en est la procédure ?

S.A : On est dans l’attente du rendu de l’expert sur lequel vont statuer les juges.

Il n’y a pas de date ?

S.A : Non. Ils demandent, que ce soit l’équipe médicale actuelle comme le professeur qui a fait l’expertise, que cela aboutisse très vite.

En quoi la suspension de peine permettrait-elle qu’il se soigne mieux ?

S.A : Les médecins qui le suivent aujourd’hui, le suivent bien. Ce sont des gens très sérieux qui nous ont réservé un excellent accueil. Ces personnes disent : "Nous ne sommes pas oncologues." Ils appliquent les traitements définis par l’hopital qui est un des spécialistes de ce type de cancer. Mais ils disent : "Nous ne sommes pas les mieux placés pour autant." Ils pensent qu’il faudrait faire en sorte qu’il puisse y avoir une suspension de peine pour qu’il puisse aller vers un établissement vraiment spécialisé. Si nous aboutissons à la suspension de peine, il faudra le rapprocher de l’hôpital le plus pointu concernant son cancer. Mais nous avons également un excellent établissement à Saint-Sébastien. Après, il faudrait savoir comment réagirait l’Espagne… Mais, déjà, la suspension de peine. Je suis toujours de la politique des petits pas. Là il faut faire des grands pas parce que le temps nous est compté.

Vous l’avez rencontré ? Comment va-t-il ?

S.A : Je l’ai vu, j’ai parlé avec lui. Il croit en la vie, il dit : "Je vais me soigner." Il a le moral, vraiment. Après, physiquement, on voit malgré tout que c’est quelqu’un de très atteint. Donc je ne regrette pas, j’ai pensé qu’il fallait le faire.

Est-ce un message vers Oier Gomez ? Vers le Gouvernement ?

S.A : J’ai rencontré le service médical, notre visite a créé un petit moment d’émotion. Mais nous étions dans notre bon droit. On s'est quittés bons amis avec le service pénitentiaire qui était là, qui est présent.

Ils étaient prévenus ?

S.A : Surtout pas. C’est ce qu’ils nous reprochaient justement. On leur a dit que les textes de lois, nous les connaissions un peu [les députés peuvent rentrer dans les lieux de privation des libertés, ndlr.]. Dans un premier temps, nous avons montré notre carte et dit : "Nous sommes députées, nous venons visiter l’unité." Une fois dans l’unité, ils m'ont demandé : "Quelle partie de l’unité vous voulez visiter." Je me suis plantée devant eux en leur répondant : "On ne va pas se raconter d’histoires, nous venons voir Oier Gomez. C’est lui que nous voulons voir." Cela s’est bien passé quand même.

Quel est le message que vous voulez adresser au gouvernement avec cette action ?

S.A : Je n’ai pas voulu communiquer avant la manifestation [de samedi, ndlr.]. Cécile communique de son côté. Moi je vais juste publier un texte sur mon Facebook pour dire que j’y suis allée. Mais je voulais que cela s’inscrive dans la journée de [samedi].

Mais quel est ce message, précisément ?

S.A : Je suis déjà intervenue à plusieurs reprises auprès de Jean-Jacques Urvoas [garde des Sceaux]. Je lui ai demandé un rendez-vous. Donc dès lundi matin, il aura chez lui une lettre. Je renouvelle mon souhait de le rencontrer et de lui dire : Vous n’êtes pas sans savoir que je me suis rendue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, que j’ai rencontré Oier Gomez et que j’ai rencontré également l’équipe médicale. Maintenant, la France s’en tirerait grandie de lui accorder cette suspension de peine.

La décision dépendra quand même des autorités judiciaires. Le garde des Sceaux n’a, en principe, pas de marge de manoeuvre…
S.A : Oui. Logiquement…