Justine Giraudel

La colère gronde chez les travailleurs sociaux

Diminution des aides, disparition des services et des emplois… L'action sociale va mal, tant pour ses bénéficiaires que pour ses salariés. Pour l'union locale de la CGT, le budget en berne répond avant tout aux choix politiques du Département et du gouvernement.

Christine Boutet et Muriel Reignier craignent que la réforme territoriale contribuent aussi à mettre à mal les politiques d'action sociale. © Isabelle Miquelestorena
Christine Boutet et Muriel Reignier craignent que la réforme territoriale contribuent aussi à mettre à mal les politiques d'action sociale. © Isabelle Miquelestorena

Source d'inquiétude, la loi NOTRe aura finalement confirmé la vocation (et priorité) sociale du Département. Et pourtant, les décisions du nouvel exécutif local inquiètent travailleurs sociaux et syndicats. Après la disparition des Lieux de rencontre et d'accompagnement (LRA) du Pays Basque et du Béarn, c'est désormais à la Mutuelle Sociale Agricole (MSA) et aux association d'éducation spécialisée de pâtir du désengagement de la collectivité. Face à un contexte des plus tendus, la CGT 64 fait part de ses inquiétudes.

Muriel Reignier est secrétaire générale de l'union départementale de la CGT, Christine Boutet, déléguée et attachée territoriale à disposition du Comité d'oeuvre sociale. Si les visages sont souriants, la parole posée, à l'intérieur les deux femmes bouillent.

Bénéficiaires et salariés sont touchés de plein fouet, s'insurgent-elles. D'un côté, elles assistent aux baisses des aides individuelles, des aides aux associations, à l'accès aux droits (Infodroits, Apavim), à la fin de la gratuité des transports scolaires (voir article associé). De l'autre, les congés maternité ne seraient pas remplacés, les départs à la retraites non renouvelés, les vacataires et temps partiels, multipliés.

Début janvier, les lieux de rencontre et d'accompagnement (LRA) disparaissaient. Au même moment, une enveloppe de 550 000 euros était enlevée à la MSA, contraignant la fermeture de neuf postes d'assistantes sociales. Et toujours la même réponse : les bénéficiaires seront redirigés vers les Maisons de la solidarité départementale (MSD) et leurs agents territoriaux. "Mais ce n'est pas possible, estime Christine Boutet. Nous travaillons déjà à flux tendu et ne pouvons pas correctement accueillir un nouveau public."

Le Département taillerait dans le gras, sans se soucier de s'attaquer à une vache déjà bien maigre. Côté politique, la brutalité du nouvel exécutif de centre-droit a été dénoncée par le groupe de la gauche départementale. Pour les deux syndicalistes, le clivage des couleurs politiques ne tient pas : le Département entrerait dans la même lignée que le gouvernement français. "Toute politique relève du choix des décideurs", rappelle Christine Boutet, et répond à des stratégies économiques et politiques, aujourd'hui, à l'abandon de l'action sociale. Les budgets en berne n'expliquent pas tout. Pour Muriel Reignier, "ce que nous vivons dans notre département ne se retrouve pas chez certains de nos proches voisins".

Un abandon politique

Dans la ligne de mire des deux syndicalistes, la prime d'activité "sur laquelle aucun travail de communication n'est fait", estiment-elles. Un rapide tour sur la toile et les médias d'information modère leurs propos. Pour la CGT, elle illustrerait le mépris du gouvernement, parti du postulat que seuls 60 % des ayant-droits en effectueraient la demande, et qui l'aurait budgétisée en conséquence. Le syndicat compte sur les travailleurs sociaux et les médias pour inciter les bénéficiaires à la réclamer (directement en ligne, sur le site de la Caf).

Localement, une réunion aura achevé de mettre le feu aux poudres. Pour la deuxième fois consécutive, raconte Christine Boutet, trois conseillers départementaux de la commission santé, habitat et action sociale auraient quitté le comité technique avant la fin, laissant en plan les dossiers et entre eux les professionnels, ce qu'elle n'est pas prête à accepter. Un départ précipité qui ne serait pas dû, selon elle, à des frictions mais à un désintérêt pour la question. Quoiqu'il en soit, la colère gronde, et qui côtoie des travailleurs sociaux le sait : la coupe est pleine et l'enveloppe, vide.