Caroline MALCZUK

Le ton de François Fillon s'est encore durci, Halle d'Iraty

François Fillon était attendu par ses fervents supporters du Pays Basque, hier soir, à la Halle d’Iraty de Biarritz. Lors du meeting, il a durci le ton contre ses adversaires, l’acharnement judiciaire dont il se dit victime mais aussi l’insécurité, le terrorisme et l’immigration. Le candidat de la droite se crisperait-il dans ses positions ? Reportage.

François Fillon a toujours pu compter sur le soutien de Claude Olive, maire d'Anglet, qui l'accmpagnait de près hier. ©Bob EDME
François Fillon a toujours pu compter sur le soutien de Claude Olive, maire d'Anglet, qui l'accmpagnait de près hier. ©Bob EDME

Il est 18 h 45 et la foule qui s’est massée dans la Halle d’Iraty s’impatiente. Les drapeaux bleu, blanc, rouge sont déjà brandis. Des "Fillon, président" retentissent de temps en temps. Certains attendent debout, appareil photo ou portable en main, le long du corridor que François Fillon empruntera, espérant pouvoir avoir un selfie avec celui qui est pour eux un homme providentiel. Une octogénaire est venue d’Etchebar pour passer le bonjour du village où le candidat a une maison familiale. Et elle y tient beaucoup. Quitte à pousser un peu. Chez "Les étudiants avec Fillon", Marc et Gaspard sont convaincus qu’il reste le meilleur candidat "pour avoir une majorité à l’assemblée" et "mettre en place son programme". Les déboires judiciaires de François Fillon, ils sont d’ordre privé selon eux. Les deux soutiennent un "acharnement judiciaire" mais assument moins la thèse d’un soi-disant complot.

La salle est en transe. Les drapeaux se font plus nombreux et agités dans les airs. Il arrive et traverse la foule furtivement. Mais notre villageoise souletine aura eu le temps de lui faire passer son mot à l’oreille. Au micro, Claude Olive annonce la présence de 4 000 personnes dans la salle. Des chiffres souvent à relativiser quand ils viennent des organisateurs d’une manifestation. On était plus proche des 3 000. Mais le fait est qu’il n’y a aucune place assise et que beaucoup doivent rester sur leurs deux jambes. Le maire d’Anglet commence par taper sur François Hollande et Emmanuel Macron, encouragé par les hurlements du public, pour mettre en avant celui qu’il soutient "depuis le début". Il l’annonce : "L’alternance a un nom, c’est François Fillon."

Sauf que c'est Virginie Calmels, l'adjointe du maire de Bordeaux, qui prend la parole. Ce qui ne plaît apparemment pas à la foule qui se met rapidement à la huer, malgré la protestation de certains plus modérés dans le public. Un signe clair et fort d'une droitisation de l'électorat du candidat gagnant de la primaire. Exit le fait qu'Alain Juppé se soit rangé derrière lui. Et ses soutiens avec.

François Fillon s'empare - enfin diront-ils tous - de la tribune. Il commence par remercier ses lieutenants locaux et note la présence de son père. Après une comparaison entre le rugby et son combat mené lors de la campagne, il attaque son discours par un credo beaucoup (trop?) entendu ces dernières semaines. L’acharnement médiatique - "Jamais il n’y avait eu un tel déchaînement contre un homme" - va de pair avec l’affirmation d’un complot de la gauche. Des mots précis ont été mis sur cette thèse lors de L'émission politique de France 2 où il a évoqué un "cabinet noir" à l’Elysée. "La seule façon de sauver la gauche, c’est de tuer Fillon" mime-t-il. Le fameux assassinat politique…

Le candidat de la droite et du centre déroule un programme dont chaque ligne est applaudie. Dette publique, chômage, terrorisme : François Fillon n’a pas que ses adversaires comme énemis. Il veut "libérer l’énergie de nos entreprises", alléger la souffrance des agriculteurs en supprimant des une couche de normes, diminuer les charges qui pèsent sur les salaires pour améliorer le pouvoir d’achat, augmenter les petites retraites, faire travailler plus les fonctionnaires avec moins… Un savant mélange d’austérité, de libéralisme et d’un semblant de social.

Mais force est de constater que François Fillon dresse un tableau plutôt noir de la France actuelle. En conséquence, il amplifie la réalité et durcit les réponses dans des thèmes systématiquement repris par le Front national. A un degré inférieur du parti à la flamme. Quand il dit que "la violence monte dans notre pays", Marine Le Pen soutient qu’il y a une situation "d’explosion de l’insécurité". Quand il dit que l’immigrations doit être "réduite à son stricte minimum", Marine Le Pen veut arrêter l’immigration. Ou quand il veut que le culte musulman soit soumis à un "contrôle administratif". Pour finalement déclarer que son intention est de réconcilier la France "avec elle-même" et affirmer : "Je suis le seul à proposer un programme logique et cohérent." Cohérence, vraiment ?

Bien sûr, François Fillon s’est adressé ce soir à un public convaincu. En terrain conquis ? Cela est moins sûr. Le souvenir du bruit des casseroles qui lui ont servi de comité d’accueil nous le rappelle.