Justine Giraudel

Le CADE envoie valser les chiffres de la LGV

Conférence de rentrée pour le Cade, et au menu du jour la LGV. Les militants l'affirment et le prouvent : les chiffres à l'origine du projet sont erronés.

Le risque de saturation de la ligne Bordeaux-Irun, le CADE le dément. © Isabelle Miquelestorena
Le risque de saturation de la ligne Bordeaux-Irun, le CADE le dément. © Isabelle Miquelestorena

Le Cade poursuit son travail minutieux, dense et engagé pour contrer la LGV. Et, pas peu fiers, ses membres l'affirment : "l'actualité nous donne raison". Dans un rapport remis le 29 septembre, huit sénateurs "de gauche et de droite" préconisent "de geler des lignes à grande vitesse pendant quinze ans" rapportait Marie-Hélène Des Esgaulx (Les Républicains), vice-présidente de la commission des Finances du Sénat. L'objectif : recentrer les forces – et les investissements – sur l'existant et remettre à niveau le réseau vieillissant.

Au mois d'août, les agglomérations bayonnaise et paloise refusaient quant à elles de s'acquitter de leur paiement pour le tronçon de la LGV reliant Tours à Bordeaux. Le 10 juin, un référé de la Cour des comptes envoyé au Premier ministre interrogeait les actions de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France – essentiellement approvisionnée par voie de taxes. Un "opérateur sans feuille de route" selon le Cade, dont les comptes virent au cramoisi : 11,86 milliard d'euros de restes à payer et 746 millions d'euros de dettes. Une situation que le tunnel ferroviaire Lyon-Turin et le canal Seine-Nord en projet ne viendraient que plomber davantage, affirment les militants.  

Entre autres conclusions, la Cour conseille au gouvernement de définir les priorités des projets à venir, notamment au regard de leur rentabilité socio-économique, et de réduire considérablement les engagements nouveaux.

Les chiffres valsent...

Un contexte toujours peu favorable pour ces projets placés dans la case des inutiles par les associations qui les combattent. Dans la Nouvelle-Aquitaine, plusieurs recours ont été déposés cet été suite à la déclaration d'utilité publique du GPSO. Et, on s'en souvient, le Cade avait activement participé à l'un d'entre eux dans les Landes. Il faudra compter un à un an et demi avant d'en savoir plus mais, en attendant, les militants sont bien loin de se tourner les pouces.

La conférence de presse de ce mercredi 5 octobre a été l'occasion pour Victor Pachon et ses accolytes de revenir – et démonter – le présupposé à l'origine de la LGV en Pays Basque : le risque de saturation de la ligne Bordeaux-Irun à l'horizon 2020. Mais pour ce faire, il faut des chiffres. Le Cade est parvenu à s'en procurer.

"Nous présentons ici notre observatoire à nous – en écho à l'observatoire des trafics disparu en 2014 après deux ans de fonctionnement, ndlr. – sur la base de données fournies par la SNCF" explique le président du collectif. Entre 2011 et 2015, le nombre de passagers a en moyenne baissé de 6,5 % dans les principales gares du Pays Basque (93 112 de moins). Depuis 2006, le nombre de passagers montés et descendus en gare a chuté de 21 % à Bayonne, 26,5 % à Biarritz et 16 % à Saint-Jean-de-Luz.

A l'heure de l'ouverture du débat public (2006), les projections tablaient sur le passage de 275 trains quotidiens en sortie de Bayonne pour 100 à l'époque – marchandises et voyageurs compris. Qu'en est-il aujourd'hui ? Premier coup d'éclat, en juillet 2014 le réseau ferroviaire reconnaissait compter par deux fois le passage de 39 trains quotidiens (14 561 à l'année). Pas de quoi affoler la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) qui reconnaît l'erreur mais affirme que la tendance est juste, le double comptage étant déjà à l'oeuvre pour les chiffres de 2006, 2011 et 2012. Victoire pour les militants, cela prouve que le critère principal pour juger d'une éventuelle saturation du réseau se base sur des chiffres faussés.

A l'heure actuelle, le nombre de trains enregistrés sur le réseau ferroviaire sur le tronçon Saint-Vincent-de-Tyrosse est de 52 par jour dans les deux sens. Une fois retirés les trains de voyageurs, il reste 13 trains de fret. Soit 6,5 par sens, contre 10 en 1999 insiste le Cade.

… et le train se meurt ?

Conclusion de la démonstration : le transport est en chute, côté voyageurs comme marchandises. La faute à une absence de politique ferroviaire, estiment les militants. La grande vitesse écarterait une part grandissante de la population de ce moyen de transport, "chaque nouvelle ligne s'accompagne d'une flambée des prix" et mettrait en péril la SNCF elle-même. Les trains se dégradent, les lignes nocturnes disparaissent faute de moyens– comme la Palombe Bleue qui relayait Hendaye à Paris – pour le plus grand bonheur des "bus Macron" ou du co-voiturage, attirant vers eux les bourses les plus modestes.

Retrouvez l'ensemble des documents présentés par le CADE ici.